LOI n°2011/ 025 du 14 décembre 2011 portant valorisation des gaz associés
L’Assemblée Nationale a délibéré et adopté, le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
CHAPITRE 1 : DISPOSITIONS GENERALES
Article 1er – la présente loi porte valorisation des gaz associés.
Article 2 – la valorisation des gaz associés vise à :
Promouvoir la récupération des gaz actuellement rejetés ou torchés, pour leur commercialisation ;
Créer un environnement contractuel et fiscal susceptible d’inciter tout titulaire de contrat pétrolier à valoriser les gaz associés ;
Contribuer à la réduction des gaz à effet de serre et à la protection de l’environnement.
Article 3 – Au sens de la présente loi et de ses textes d’application, les définitions ci-après sont admises :
Autorisation compétente : toute autorité administrative appelée à intervenir dans l’attribution d’un acte administratif dans son domaine de compétence pour l’application de la présente loi et ses textes d’application ;
Autorisation d’exploitation : acte administratif par lequel il est accordé à une société pétrolière ou à un groupe de société pétrolière le droit de produire ou de valoriser les hydrocarbures ;
Autorisation de torchage : acte administratif par lequel il est exceptionnellement permis à l’opération de brûler du gaz associés ;
Contrat pétrolier : contrat de partage de production ou contrat de concession tel que défini par le code pétrolier ;
Crédit carbone : crédit d’émission ou de réduction d’une tonne équivalent de dioxyde de carbone, transférable à titre onéreux ;
Ecosystème : complexe dynamique formé de communauté de plantes, d’animaux, de micro-organismes et de leur environnement vivant qui, par leur interaction, forment une unité fonctionnelle ;
Gaz associés : gaz présents en solution dans le pétrole brut et séparés de celui-ci lors de l’extraction ;
Gaz à l’effet de serre : composants gazeux naturels ou du fait de l’activité humaine contenus dans l’atmosphère, qui absorbent le rayonnement infrarouge émis par la surface terrestre ;
Hydrocarbures : composants liquides ou gazeux existant à l’état naturel selon le cas, ainsi que tous les produits et substances connexes extraits en association avec lesdits composants ;
Installation : tout disposition ou toute unité fixe ou mobile qui participe à la production des gaz associés ;
Norme de torchage : ensemble de règles auxquelles l’opérateur doit se conformer lors d’un torchage utile ou en cas d’autorisation exceptionnelle de torchage ;
Opérateur : société pétrolière titulaire ou co-titulaire à laquelle est confiée la charge de la conduite des opérations pétrolières conformément aux stipulations du contrat pétrolier ;
Rejet : dissémination dans l’atmosphère du gaz échappé lors des opérations d’exploitation d’hydrocarbure ;
Secteur pétrolier amont : secteur qui comprend les activités d’exploration, d’exploitation des hydrocarbures liquides et gazeux existants à l’état naturel ;
Secteur pétrolier aval : secteur qui comprend les activités de transformation, de transport, de distribution, de stockage, d’importation, d’exportation et de vente des hydrocarbures liquides et gazeux ;
Site d’exploitation : emplacement où l’opérateur effectue des activités d’exploitation d’hydrocarbures ;
Surveillance administrative : contrôle de l’Administration sur les activités de l’opérateur ;
Tiers : personne physique ou morale non partie au contrat pétrolier, mais ayant conclu avec l’opérateur une convention aux fins d’exploitation des gaz associés en lieu et place de l’opérateur ;
Torchage : opération qui consiste à brûler le gaz issu de la production pétrolière.
CHAPITRE II : DU REGIME JURIDIQUE DES ACTIVITES LIEES AUX GAZ
ASSOCIES
SECTION 1 : DE L’EXPLOITATION DES GAZ ASSOCIES
Article 4 – (1) Les gaz associés comprennent :
Les gaz utilisés pour les besoins des opérations pétrolières sur site, rejetés dans la nature ou brûlés à la torche lors de l’extraction du pétrole brut ;
Les gaz transférés d’opérateur à opérateur pour les besoins de l’exploitation pétrolière.
(2) L’exploitation des gaz associés visés dans la présente loi est une activité connexe à la production du pétrole brut.
Article 5 – (1) L’exploitation des gaz associés est soumise au régime de l’autorisation tel que défini dans le code pétrolier.
(2) L’autorisation d’exploitation confère à son titulaire le droit exclusif d’effectuer à ses risques et périls, dans la limite du périmètre du contrat pétrolier auquel elle se rattache, toutes opérations visant à la valorisation des gaz associés.
Article 6 -(1) Les gaz associés sont la propriété exclusive de l’Etat du Cameroun.
(2) Ils peuvent être exploités par :
Les sociétés titulaires de conventions d’établissement, de contrats d’association ou contrats pétroliers dont les activités portent sur l’exploitation des hydrocarbures,
Un tiers ayant conclu une convention à cet effet avec le titulaire d’un contrat pétrolier après approbation préalable du Ministère chargé du secteur pétrolier amont ;
L’Etat du Cameroun ou tout établissement public dûment mandaté ;
La convention entre le titulaire du contrat pétrolier et le tiers doit préciser les modalités de transfert de gaz, la répartition des obligations légales et contractuelles liées aux opérations d’installations et de remise en état des sites, la répartition des coûts d’arrêt de production lors de l’installation des risques et des responsabilités en cas de défaut technique ou d’accident, ainsi que les modalités de règlement des différends.
(4) lorsqu’un établissement public est mandaté par l’Etat, l’autorisation lui est accordée sans contrepartie.
Article 7 -(1) Le titulaire d’un contrat pétrolier doit notifier au Ministre chargé du secteur pétrolier amont, dans les conditions prescrites par le Code pétrolier, toute découverte d’hydrocarbures liquides commercialement exploitables, ainsi que le projet de valorisation des gaz associés y afférents ;
(2) Après approbation du plan de développement de découverte d’hydrocarbures liquides et du projet de valorisation par le Ministère chargé du secteur pétrolier amont, l’opérateur est autorisé à entreprendre l’exploitation des gaz associés dans les conditions prescrites par le Code pétrolier ;
(3) Le titulaire du contrat pétrolier ne peut s’exonérer de l’obligation de mise en valeur des gaz associés que lorsqu’il a apporté la preuve technique, acceptée par le Ministre chargé du secteur pétrolier amont, que lesdits gaz ne sont pas économiquement exploitables.
SECTION II DU TORCHAGE DES GAZ ASSOCIES
Article 8 – (1) Des autorisations de torchage peuvent être accordées exceptionnellement par le Ministre chargé du secteur pétrolier amont à la demande de l’opérateur, sous réserve des dispositions liées à la sécurité des installations et lorsque les facteurs techniques ou économiques le justifient, pour une durée qui ne peut excéder 60 jours renouvelable ;
(2) L’autorisation de torchage doit prendre en compte les conditions et les caractéristiques des réservoirs de gaz dans le sous-sol et les modalités de leur exploitation ;
(3) Les modalités d’application des dispositions relatives au tochage des gaz associés sont fixées par voie réglementaire.
Article 9 – (1) Les quantités des gaz associés torchés doivent faire l’objet d’un rapport de l’expiration de la période d’autorisation ;
Ledit rapport est adressé par l’opérateur au Ministre chargé du secteur pétrolier amont pour le contrôle de conformité à la norme de torchage ;
(2) La norme de torchage est fixée par voie réglementaire.
Article 10 – Tout opérateur exerçant dans le secteur pétrolier amont est tenu de se conformer à la norme de torchage et de rejet des gaz associés.
CHAPITRE III : DE LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT ET DES MESURES
DE SECURITE
Article 11 – (1) L’opérateur doit réaliser ses activités, tout en préservant la sécurité des personnes et des biens ainsi que l’environnement et les écosystèmes ;
(2) il est tenu d’appliquer les normes d’hygiène, de sécurité et de protection de l’environnement, conformément aux dispositions légales et réglementaires en vigueur, aux pratiques et usages dans l’industrie pétrolière, ainsi qu’aux traités internationaux signés et ratifiés par le Cameroun en matière d’émission des gaz à effet de serre ;
Article 12 – (1) L’opérateur est tenu de mettre en conformité les installations nécessaires pour l’exploitation des gaz associés, pendant la période transitoire mentionnée à l’article 25 ci-dessous ;
(2) les modalités de mise en conformité sont fixées par voie réglementaire.
Article 13 – L’opérateur peut solliciter le bénéfice du mécanisme de développement propre ou tout autre mécanisme similaire permettant d’obtenir des crédits carbone auprès du Ministre chargé des questions environnementales.
CHAPITRE IV : DE LA SURVEILLANCE ADMINISTRATIVE ET TECHNIQUE
Article 14 – La surveillance administrative et technique des activités liées aux gaz associés est assurée par le Ministre chargé du secteur pétrolier amont, en collaboration avec toutes les autres Administrations compétentes.
Article 15 – (1) La surveillance administrative et technique porte notamment sur :
Le contrôle de conformité à la norme de torchage ;
La vérification des volumes de gaz torchés ;
Le maintien en bon état d’utilisation des équipements et installations ;
La sécurité des personnes et des biens ;
La protection de l’environnement.
(2) les modalités d’application des dispositions de l’alinéa 1 ci-dessus sont fixées par voie réglementaire.
CHAPITRE V : DES DISPOSITIONS COMPTABLES, FISCALES, DOUANIERES
ET DU REGIME DE CHANGE
SECTION 1 : DE LA COMPTABILITE
Article 16 – La comptabilité de l’exploitation des gaz associés est régie.
Article 17 – (1) L’opérateur tient une comptabilité séparée entre ses activités d’exploitation d’hydrocarbures liquides et celles d’exploitation des gaz associés.
(2) sans préjudice des dispositions fiscales en vigueur, les comptes certifiés sont déposés auprès de l’autorité compétente dans les trois (3) mois au plus tard après la clôture de l’exercice fiscal, sous peine de sanctions prévues à l’article 22 ci-dessous.
SECTION 2 : DE LA COMPTABILITE
Article 18 – L’opérateur est assujetti au régime fiscal prévu par le code pétrolier.
Article 19 – Nonobstant les dispositions de l’article 18 ci-dessus, les opérations d’exploitation de gaz associé bénéficient des mesures fiscales suivantes :
exonération du paiement de l’impôt sur les sociétés pendant les cinq (5) premières années d’exploitation. A l’expiration de ladite période, l’opérateur des gaz associés est assujetti au paiement de l’impôt sur les sociétés au taux réduit le trente –cinq pour cent (35 %) ;
exonération des droits d’enregistrement des baux d’immeubles, à usage exclusivement professionnel faisant partie intégrante du programme d’investissement ;
exonération des droits de mutation sur l’acquisition des immeubles, terrains et bâtiments indispensables à la réalisation du programme d’investissement ;
exonération de la redevance proportionnelle à la production prévue par le Code pétrolier ;
bénéficie, pendant les dix (10) premières années d’exploitation des gaz associés, de la déduction des amortissements normalement compatibilisés pendant les trois (3) premiers exercices sur le revenu imposable des cinq (5) exercices suivants.
Article 20 – L’opérateur est soumis aux régimes douaniers et de change prévus par le Code pétrolier.
CHAPITRE VI : DES INFRACTIONS ET DES SANCTIONS
SECTION 1 : DES INFRACTIONS
Article 21 – Sont considérées comme infractions au sens de la présente loi :
le torchage sans autorisation ;
le torchage non conforme aux dispositions de la présente loi ;
le non respect de la norme de torchage ;
le non respect des règles techniques, de sécurité et d’hygiène relatives aux opérations de torchage ;
le non respect des règles portant sur l’environnement ;
le défaut d’entretien des installations ;
le non respect des normes comptables prévues par la présente loi ;
la dissimulation des informations et communications dont le Ministre chargé du secteur pétrolier amont a la charge du suivi ;
l’entrave au contrôle des agents assermentés.
SECTION II : DES SANCTIONS
Article 22 – (1) En cas d’infraction, le Ministre chargé du secteur pétrolier amont prononce à l’encontre de l’opérateur, l’une des sanctions suivantes :
l’amende ;
la suspension de l’autorisation de torchage ;
le retrait de l’autorisation de torchage.
(2) les sanctions visées à l’ilinéa 1 ci-dessus ne prennent effet qu’après une mise en demeure de l’opérateur restée sans suite dans un délai de trente (30) jours.
Article 23 – Le montant des amendes est fixé comme suit :
torchage sans autorisation : deux cent cinquante millions (250 000 000) F CFA ;
violation de la norme de torchage : cent millions (100 000 000) FCFA ;
non respect des règles techniques, de sécurité, d’hygiène relatives aux opérations de torchage : cinquante millions (50 000 000) F CFA ;
non respect de règles portant sur l’environnement : vingt millions (20 000 000) F CFA ;
défaut d’entretien des installations : cinquante millions ( 50 000 000) F CFA ;
non respect des normes comptables prévues par la présente loi : cinquante millions (50 000 000) F CFA ;
dissimulation des informations et communications : cinquante millions (50 000 000) FCFA ;
entrave au contrôle des agents assermentés et habilités : cent millions (100 000 000) F CFA ;
défaut de paiement des amendes : majoration de dix pour cent (10 %) par mois.
CHAPITRE VII : DISPOSITIONS TRANSITOIRE ET FINALE
Article 25 – La période transitoire de mise en conformité des installations pour l’exploitation des gaz associés est fixée à trois (3) ans, à compter de la promulgation de la présente loi.
Article 26 – La présente loi sera enregistrée, publiée suivant la procédure d’urgence, puis insérée au Journal Officiel en français et en anglais.
Yaoundé, le 14 décembre 2011