MASSOCK-SONGLOULOU
De Songlolo à Songloulou
Au cœur de la Sanaga maritime, un petit village abrite un immense barrage. L’inauguration de cet édifice, en 1982 par le premier président de la république, Admadou Ahidjo, a suffit pour changer son nom.
C’est Ahmadou Ahidjo qui, lors de l’inauguration de l’édifice, a écorché le nom du village. Comme il toussait énormément pendant ses discours, il a prononcé Songloulou, au lieu de Songlolo. Depuis, l’appellation déformée est restée. C ‘est celle que tous les visiteurs – et même une bonne partie du Cameroun – connaissent. Alphonse Bernard Nonga est le président du Conseil supérieur du canton Ndog Mbog, dans l’arrondissement de Massock, qui abrite l’un des barrages les plus importants d’Afrique centrale. Elite de ce canton, il raconte comment un ancien chef d’Etat a changé malgré lui, le nom d’un village, falsifiant en quelque sorte une partie de son talon sociologique «Il n’y a plus que les populations nées dans la région, ou qui y habitent, qui connaissent le nom d’origine du site, et comment le glissement a été opéré de Songlolo à Songloulou.»
Une transformation qui a pour conséquence immédiate le travestissement l’histoire du village. Songlolo signifie, littéralement, la tombe de Lolo.
Mais qui était ce Lolo ? Certains témoignages, recueillis sur place auprès des anciens du village, rapportent que Lolo était l’ancêtre éponyme des Ndog Mbog, un peuple qui s’est échoué sur les bords de la Sanaga, lors des grandes migrations du XVème siècle, Ils se sont installés au pied de la chute, mais cette dernière était tellement puissante, que le peuple et son chef ont fini par mourir de fatigue. D’où le nom donné au site, Songlolo, c’est-à-dire la tombe de lolo. Une autre version, tout aussi répandue dans le coin, situe la dénomination du village à partir d’un poisson le lolo, généralement de petite taille, ressemblant à bien ‘s égards au silure ou encore à un bébé mâchoiron. Sa peau est grisâtre, glissante, la chair ferme ‘° jet la tête légèrement aplatie. L’histoire raconte aussi que celui qui a mangé le lolo sans avoir consommé sa tête, ne peut se vanter de l’avoir dégusté tout est dan la tête du lolo. «Outre les cartilages les osselets qu’elle comporte, ce poisson offre une graisse que l’on peut accommoder avec presque tous les mets de la région », explique riverain du célèbre barrage.
On peut donc comprendre pourquoi les populations de Massock Songloulou regrettent le bon vieux temps où les eaux du coin abondaient en poissons, crustacés et autres alligators «La chute de er Songloulou servait à pourvoir les villages environnants en crocodiles, crabes, crevettes et beaucoup de poissons. La construction du barrage a fait envoler toutes ces richesses. Si nous ne pouvons obtenir la gratuité de l’électricité, à titre compensatoire, au moins qu’on nous la fasse payer au rabais», avançait Denis Hiondi, pasteur de l’Eglise presbytérienne camerounaise (Epc) locale, lors du mouvement d’humeur qui a conduit les va populations de l’arrondissement de Massock-Songloulou à prendre g en otage le puissant édifice. Elles voulaient, indiquaient les pancartes, «profiter des retombées du bar- rage et amener Aes Sonel à investir dans le développement durable du canton».
Une revendication qui faisait déjà ai partie du contenu des palabres layant précédé la construction du barrage: «En 1968, rappelle David Ka’Nkangui, les clauses de la tenue des palabres mentionnaient le bitumage de Kopongo jusqu’au barrage.» Et d’ajouter : «Avant de construire Lagdo, on a construit un boulevard. A Songloulou, il y a juste une piste. Le dispensaire a été supprimé. Les eaux du barrage étaient un trésor économique, pour toute la région. Nous vivions de pêche, pour payer les études de nos enfants. Aujourd’hui, nous n’avons plus aucun avantage. On nous a maintenus en état d’esclavage, comme si on voulait tuer le village et ses habitants». Le septuagénaire, en plein désarroi, n’entrevoit plus aucun espoir pour son village, malgré les souvenirs agréables qui remontent à la surface. A moins que le Partenariat des entreprises pour le développement (Ped) de la Sanaga Maritime, signé le 17 mars 2006 à Edéa entre 6 sociétés de la région, dont Aes Sonel, Alucam, Safca, soit une amorce de réponse à cette préoccupation.
Massock-Songloulou est un petit village situé dans la Sanaga Mari time à une quarantaine de kilomètres d’Edéa et à une centaine de kilomètres de Douala. Pour accéder à Massock, c’est la croix et la bannière. Le trajet de Douala, jusqu’à Songmbenguè, à quelque 21 kilomètres de Massock, est en bon état, mais à partir de Songmbenguè, c’est une calamité. La piste, caillouteuse par endroits, non bitumée, est poussiéreuse en saison sèche et boueuse par temps de pluies. Elle devient difficilement praticable, dès qu’une goutte de pluie y tombe: «Pendant la saison des pluies, les véhicules qui s’aventurent sur cette voie sont
abandonnés sur place, parfois plu sieurs semaines durant. Même les camions de Aes Sonel sont régulièrement pris au piège», relate un témoin.
Une réalité qui isole, un peu plus, cette partie de la Sanaga Maritime du reste du département, et même du pays. D’autant plus que la distribution de l’électricité, dans le district, laisse à désirer. Le cordonnier, c’est bien connu, n’est pas toujours le mieux chaussé. Côté emploi, c’es encore autre chose. L’unique employeur de taille, c’est bien Aes Sonel, à travers le barrage. Une société qui, fin 2004, à travers la sous-traitance, avait embauché jusqu’à 53 fils et filles de la région dans le barrage, avant que leur nombre ne se réduise comme une peau de chagrin, l’année suivante, le nouveau directeur du barrage ayant décidé de travailler avec un autre sous-traitant. Du coup, ce sont plus de 45 jeunes de la région qui se retrouvent au chômage, complètement désœuvrés. Et leurs familles, forcément en difficulté, commencent à se demander ce que le barrage a apporté à cette région depuis son édification. «Même l’électricité n’arrive que trop irrégulièrement, alors que, depuis au moins 10, l’opérateur d’électricité ne paie pas ses taxes à la commune», s’indigne le maire de Massock Aron Kaldjop.
Songloulou et son barrage. Une histoire faite de hauts et de bas : au début de l’installation du barrage, la Sonel, qui l’exploitait, s’investissait dans le développement de la région. Depuis que c’est Aes qui est là, les relations entre cette entreprise et la commune se sont considérablement dégradées, disent en choeur nombre d’habitants de Massock, dans le canton Ndog Mbog. Ils ont fini par prendre le barrage en otage, en février dernier, pendant plusieurs jours.
Côté pile, il y a le village du barrage de Songloulou. Là, c’est presque le paradis sur terre. Pour y pénétrer, il faut franchir au moins une barrière, gardée par des agents sécurité. Les routes sont impeccablement tracées. L’espace, bien aménagé, intègre parfaitement la nature : jardins géants, faits de plantes et de fleurs, le tout arrosé par la chute de Songloulou. Les constructions sont, certes, des baraquements, mais ils épousent harmonieusement l’environnement. Ici, l’électricité est gratuite, et les quelques habitants ne savent pas ce que
délestage veut dire. Massock-Songloulou, c’est malheureusement Tanga Nord et Sud. L’enfer et le paradis, dans une même commune.
Jeckèlè
Vaste unité administrative enclavée et pauvre, le district de Massock- Songloulou s »éveille petit à petit grâce aux actiobns du gouvernement, à l’exception de ses richesses naturelles et à la volonté manifeste de rassemblement des élites. Leur retour à de bons sentiments et « au pays natal » projette déjà le développement socio- écnomique de cette localité qui abrite le barrage hydr(o-électrique de Songloulou et attend celui de Songmbengue.
Y ALLER
A partir de Douala ou de Yaoundé : bus ou autres véhicules jusqu’à Pouma. (1.500F)
A partir de Pouma : destinantion Songmbengue puis véhicule ou moto-taxi jusqu’à Massock (1.500F)
Etat de la route : Pouma-Songmbengue bitumée. Songmbengue-Massock non bitumée.
Distance : 54 km de Pouma.
Structure d’hébergement : deux auberges
REPERES
Date de création du district : 9 décembre 1993.
Superficie : 3895 km2
Population : 11.000 habitants
Cantons : Babimbi II, Ndog-Mbog et Logkat.
CHIFFRES
380 :
C’est la longueur du pont sur la Sanaga à Songmbengue, appelé pont de Sakayenne lors de son inauguration le 30 Avril 1982 par Paul Biya, alors premier ministre. Cet ouvrage d’art a résolu l’épineux problème des déplacements vers la région Babimbi et a limité les cas de noyades.
On ne saurait parler de Massok sans ajouter Songlouloui, localité qui abrite l’importante réalisation qu’est le barrage. Ce dernier qui alimente les trois quarts du pays en énergie électrique fut inauguré en 1981. Massok qui était encore un village inconnu avant le début des travaux de construction du barrage en 1977, résigné dans l’enclavement et l’éloignement commençait à envisager l’avenir avec espoir. Devenu un centre commercial débordant d’activités, selon certains témoignages, l’agriculture et la pêche permettaient déjà aux populations de nourrir le personnel du vaste chantier et d’avoir des tombées.
Pour certains, Massok-Songloulou a qui l’ouvrage présageait d’un bel avenir n’a pas pu maintenir son essor avec son érection en district en 1993, suite à l’éclatement de l’arrondissementr de Ngambé. Son passage de village traditionnel à ville-lumière tarde toujours. La joyeuse vie ne se concentre que dans certains villages excentrés tels que Songmbengue, Tomel, Nkahn, Songoulou. Dans l’ensemble, l’on attend toujours les routes praticables, la distribution de l’eau et de l’électricité en milieu rural. Toutefois, de meilleures conditions d’existence qui s’annoncent en raison des efforts du gouvernement à valoriser les ressources énergetiques (barrage prévu à Songmbengue), les infrastructures et moyens de transport, la volonté des élites de promouvoir les projets forestiers, industriels et agro-pastoraux dans les villages qui constituent les trois cantons du district (Babimbi II, Ndogmbob, Logkat).
RENAISSANCE ET MODERNITÉ
« Massok doit décoller », leitmotiv des filles et fils du coin qui croient effectivement à son avenir. Pour l’heure, c’est une bourgade pratiquement dans l’abandon, avec quelques habitats des particuliers et de l’État, et un hôtel de ville impressionnant. L’annonce du développement et le retour de ses enfants au terrois présagent déjà d’un bel avenir que matérialisera le futur barrage de Songmbengue après celui de Songloulou. Une infrstructure de plus qui répondra aux exigences de la modernité.
L’agriculture n est pas intensifiée ici. Le manque de volonté, l’exode rural et les méthodes cultivables archaïques la confinent aux produits vivriers d’auto-consommation (macobo, plantain, manioc, taro, igname…). pas de grands marchés pour les écouler, ni des hectares de palmeraies, restées pourtant l’apanage du département de la Sanaga-Maritime et celui du Nyon-et-Kéllé voisin. Quant à l’élevage et à la pêche, ils ne sont pas du goût de tous et se pratiquent de manière artisanale. Seuls les ressortissants de l’Afrique de l’Ouest affrontent facilement les eaux de la Sanaga où le poisson se fait rare, du fait de la présence des barrages (Songoulou et Edéa). Dans la zone pupllulent les « mout-mout », ces moustiques à la peine piqûre irritante qui ont surtout leur nid sur le pont Iwen, limitrophe avec Edéa II. Les maladies parasitaires que véhiculent ces simulies et bien d’autres altération qui menacent quotidiennement la santé des populations sont traités dans les dispensaires de Songmbengue et Tomel, le district n’ayant pas d’hôpital. Les cas urgents nécessitent le transfert à Sakbayenne, Edéa ou Ngambé. La commune de son côté s’évertue à réhabiliter les quatre château d’eau non fonctionnels et à en construire d’autres dans les villages. Ces derniers qui attendent toujours l’électrification, les images de la CRTV, la téléphonie rurale. Celle-ci n’alimente que les installations de Songoulou. Par contre, la couverture scolaire vient de s’enrichir avec la réaction du CES de Nkahn qu s’ajoute aux écoles primaires existantes, au lycée et au CETIC de Songmbengue au CES et à la SAR/de Massok. Il est question ici d’assurer et de privilégier l’instruction et la formation des jeunes, de conjurer la pauvreté, de stimuler de dynamisme dfe ces populations qui font souvent les bonnes tables avec le « mbongo tsobi », le « mitumba », le « mvea », et dansent de temps en temps au rythme des coquilles sans guitares, le » makoune’, « ko’o », « mbaya ».
L’exécutif communal que dirige Hyol Paul entend relever le principal défi de l’heure : s’engager dans la vie de la modernité. Les dettes sont liquidées, les stages de vacances organisés, la mise en valeur de la terre programmée, les litiges fonciers. Aujourd’hui, l’heure est à la ferveur collective des filles et fils du district veulent vaincre la pauvreté.
La nature a donné neuf chutes exploitables à la commune de Massok. A ce jour, seule celle de Songoulou est exploitée.
BALOGOG MAXIME GEORGES, CHEF TRADITIONEL DE MASSOK-VILLAGE
Les doléances adressées par les populations à AES/Sonel expriment leurs attentes à savoir, l’entretien de la voirie, notamment le bitumage de l’axe Songmbengue-Ndogmbog-Logkat, le recrutement des originaires du district à la centrale de Songoulou, la téléphonie rurale, l’accès aux services sociaux de base…
Qu’est-ce concrètement fait pour améliorer les conditions de’ vie des populations de Massok ?
Les efforts sont faits au moins à quatre niveaux : le gouvernement envisage un vaste programme de désenclavement par l’entretien des pistes rurales, ce qui va permettre aux populations d’acheminer leurs produits vivriers vers les marchés dans les centres urbains. La commune s’est lancée dans la réhabilitation de l’éclairage public.
Massok regorge de merveilles que l’on doit contempler. C’est le cas du barrage de Songoulou, inauguré le samedi 14 Novembre 1981. le chantier a été construit à l’endroit où les chutes qui auraient emporté le charismaique guide appelé LOULOU Nkou’ou, d’où l’appellation « Songoulou » (la tombe de Loulou). Les suivants de sa randonnée mettront ainsi fin à leur périple, d’où « Massok » (terminus en bassa). Cette version donnée par Georges Maxime Balogo, chef traditionnel du village Massok et délégué départemental du Développement urbain et de l’Habitat de l Sanaga-Maritime complète celle qui évoque un poisson spécial « Loulou » qui pullulait au site du barrage.
Construit sur le vaste bassin du plus long fleuve du Cameroun (918 km), cet ouvrage artificiel qui coupe le lit de la Sanaga produit plus de 70% de l’énergie électrique consommée dans le pays. En plus de ses fonds propres, l’Etat a bénéficié du financement des pays amis (Fonds saoundien et Koweitien de développement, banque islamique, banque européenne d’investissement, caisse centrale de coopération économique, le gouvernement du Qatar). Les travaux estimés à prés de 60 milliards de F CFA prévoyait, outre le barrage, le pont de 274 m sur la Sanaga qui existe sur le site, les cités disposent d’un oste de gendarmerie, d’un club, d’une école d’un dispensaire fortement équipé, une salle de loisirs, une station detraitement d’eau potables et une voie d’accès Massok-Sanaga. Cette dernière, longue de 4 km, d’une inaccessibilité déplaisante, est à l’image des routes du district. Kopongo-Massok (64 km) par laquelle &étaient acheminés matériels et engins, n’est plus qu’un triste souvenir. A cause de son état et des ponts cassés. Il faut parcourir Edéa-Pouma-Songmbengue pour atteindre péniblement Massok-Songloulou.
Un investissement aussi puisant sur une route impraticable et une sécurité tâtonnante. Les trois brigades de gendarmeries sans véhicules que loge le district (Massok, Songoulou et Songmbengue) compte une douzaine d’éléments. Même si l’on déplore peu de cas de vols ou banditisme. Le barrage de Songloulou, en même temps qu’il exprime les efforts de politique énergétique du gouvernement (production, transport, distribution), est supposé participer à l’amélioration du sort des villages. L’on constate que le beau village de AES/Sonel n’a pas apporté des valeurs positives à la modernité du district. Beaucoup de communautés villageoises s’éclairent à la lampe tempête. Le village Pout-Kembel situé à un pas du barrage et bien d’autres traversés par les pylône attendent toujours électrification, rurale. Ceux qui bénéficient des installations souffrent des coupures. Pour M. Chinda Ngu Georges, directeur de l’usine de Songoulou, AES Sonel avait déjà déboursé plus de 110 millions de F CFA en 2006 pour l’entretient routier, la redevance est payée aux communes de Massok et de Pouma qaui ont concédé le site, des aides et autres sous-traitances sont accordées aux populations. Et l’électrification de la région ? la réponse est toujours attendue.
Songloulou étant le nerf de l’énergie, une commission parlementaire avait visité l’état des équipements, peu avant les journées portes ouvertes de juin dernier qui commémoraient les sept ans sans incident grâce à des mesures de sécurité assurant la protection des travailleurs.
Christopher Mbenoum, élite
« L’idéal searit de fédérer les regroupements des élites »
« Massok-Songloulou souffre de son enclavement. Nous avons des difficultés pour acheminer les dépouilles ou assister aux obsèques en période de pluies. Les populations rurales ne sont pas écoulées. Cet enclavement freine le retour des élites dans les villages. Avec l’appui du gouvernement, ces élites pourraient amorcer des actions de développement, tels que l’agriculture et l’élevage. L’idéal serait de fédérer dans un ensemble plus cohérent, les regroupements des élites qui existent. Quant à l’enclavement, la situation commence à se décanter grâce à M. Hyol Paul, jeune maire dynamique qui se d dévoue pour la localité et qu’il faut appuyer, ainsi qu’avec l’arrivée de notre frère Nyetam Nyetam comme secrétaire d’Etat aux travaux publics. Massok-Songoulou abrite le plus grand barrage du pays avec des pylônes qui passent au-dessus des toits dans des villages non électrifiés. Notre souhait est le désir de voir Massok érigé en arrondissement et Ngambé en chef-lieu de département »
Dr. Emmanuel Wonyu, élite
« Que les populations vivent des ressources forestières et énergétiques »