Historiquement, pas de LCI sous l’Ancien Régime : activités éco très réglementées par le système des corporations
Turgot, ministre de Louis XVI supprime les corporations par un édit de février 1776, établissant ainsi la LCI « toutes personnes françaises ou étrangères (sont) libres d’embrasser et d’exercer (…) telle espèce de commerce et telle profession d’arts et métiers qui bon leur semblera et même d’en réunir plusieurs ». Mais en août 1776, un nouvel édit rétablit les corporations. Pour autant la LCI reste intimement liée au dogme politique de liberté, la liberté éco étant un aspect de la liberté générale des citoyens et c’est sans doute pour cette raison que les constituants n’ont pas jugé utile de mentionner ce principe dans la DDHC (cf Jean-Louis Mestre « le CC, la liberté d’entreprendre et la propriété « )
La LCI sera finalement proclamée par la loi du 2-17 mars 1791 : décret d’Allarde, texte à portée fiscale qui crée la patente : « A compter du 1er avril prochain, il sera libre à toute personne de faire tel négoce ou d’exercer telle profession, art ou métier qu’elle trouvera bon, mais elle sera tenue de se pourvoir auparavant d’une patente, d’en acquitter le prix d’après les taux ci-après déterminés et de se conformer aux règlements de police qui sont ou pourront être faits ».
Cette loi n’interdit pas les associations professionnelles et des groupements vont des former pour défendre les anciennes prérogatives, d’où vote de la loi des 14-17 juin 1791, loi Le Chapelier qui prohibe les corporations. Loi abrogée par la loi du 21 mars 1884 sur les syndicats (le décret d’Allarde n’a pas été abrogé)
Principe de la LCI figure dans plusieurs Constitutions, notamment celle de l’an IIII (« il n’y a ni privilège, ni maîtrise, ni jurande, ni limitation à la liberté du commerce et à l’exercice de l’industrie et des arts de toute espèce ») et celle de 1848 (« la Constitution garantit aux citoyens la liberté du travail et de l’industrie ») mais rien dans la Constitution de 1946 et 1958.
Dès lors on peut s’interroger sur la valeur juridique de cette liberté mais également sur sa définition et son contenu. L’un des problèmes qui se posent notamment est celui de savoir comment s’articulent le principe de la LCI auquel le CE se réfère fréquemment et la liberté d’entreprendre à laquelle le CC a reconnu valeur constitutionnelle (décision 81-132 DC du 16 janvier 1982, première loi de nationalisation). Dans cette décision, le CC affirme que « La liberté, qui aux termes de l’article 4 de la Déclaration consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, ne saurait elle-même être préservée si des restrictions arbitraires ou abusives étaient apportées à la liberté d’entreprendre ».
Pour autant, cette liberté n’est « ni générale, ni absolue », « il est loisible au législateur d’y apporter des limitations exigées par l’IG à la condition que celles-ci n’aient pas pour conséquence d’en dénaturer la portée » (notamment : 254 DC du 4 juillet 1989, loi sur le dénoyautage des entreprises privatisées).
Cette liberté apparaît donc un corollaire du droit de propriété et une composante de la liberté. Il s’agit de la liberté d’user comme on l’entend de sa propriété, pouvoir affecter son patrimoine à une entreprise… Ainsi définie, la liberté d’entreprendre apparaît comme une composante de la LCI, entendue comme la liberté d’accéder et d’exercer librement toute profession et plus généralement toute activité économique.
Même s’il existe un débat doctrinal sur ce point, nous allons donc considérer, avec une majorité de la doctrine (notamment Chérot) que la LCI comporte deux aspects, celui de la libre entreprise et celui de la libre concurrence, la liberté d’entreprendre ne reprenant que le 1er. Cette analyse semble confortée par la jurisprudence du CE. En effet, selon le CE, la LCI un PGD (arrêt Daudignac, CE Assemblée, 22 juin 1951) et une liberté publique (CE, Sieur Laboulaye, 28 octobre 1960). Par ailleurs, dans l’arrêt Daudignac, le CE vise « la LCI garantie par loi » et il admet que le législateur porte atteinte à cette liberté. Si la LCI était une composante de la liberté d’entreprendre, elle devrait avoir la même valeur juridique (valeur constitutionnelle), or, ce n’est pas ce qui ressort de la jurisprudence du CE.
Si le principe de la LCI a été reconnu par la jurisprudence, il se heurte néanmoins à l’interventionnisme des pouvoirs publics, en effet, « l’interventionnisme et la liberté du commerce sont objectivement antinomiques » (Michel Guidal). Deux types de menaces émanent en fait de la puissance publique : il s’agit d’une part des réglementation à l’accès et à l’exercice de certaines activités et d’autre part de la concurrence émanant des personnes publiques qui entretiennent ou soutiennent des activités industrielles et commerciales. C’est ce second type de menaces qui a conduit à adopter une conception extensive du principe de la LCI, incluant le principe ou la liberté de concurrence. Selon Delvolvé, ce principe doit permettre aux particuliers d’exercer leurs activités dans un système de compétition qui ne doit être entravé ni par des prescriptions ni par des prestations provenant des pouvoirs publics.
Ainsi, comme le souligne Chérot, la liberté du commerce n’est pas seulement la liberté d’accéder à la profession de son choix, mais aussi la liberté de l’exercer librement, or la présence de personnes publiques sur le marché en concurrence avec des personnes privées serait équivalente à une réglementation des rapports économiques. Le CE fait donc appel au principe de la LCI afin de contrôler la légalité des atteintes portées au libre accès et au libre exercice de certaines professions (I) mais également pour interdire ou encadrer l’intervention économique des personnes publiques en ce qu’elle concurrence les entreprises privées (II).
I. La LCI et les restrictions à l’exercice de certaines professions
On s’intéresse ici à la protection accordée à la LCI dans son sens 1er : le libre accès et libre exercice aux activités éco et donc aux professions.
A. Affirmation du principe de la LCI
1. Malgré de nombreuses atteintes…
Sous l’empire des nécessités éco et de l’IG, le principe de la LCI a subi de multiples atteintes (OP, droit des consommateurs, de l’environnement, de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de l’hygiène, de la santé, de l’exigence d’une certaine qualification professionnelle…).
Cet interventionnisme se manifeste par différents types de restrictions + ou – attentatoires à la LCI :
• La simple réglementation : à portée générale et impersonnelle, d’ordre technique, destinée à protéger l’ordre public (sécurité, hygiène, vérifier l’aptitude de ceux qui vont diriger l’activité. Peu restrictives dès lors que l’on se conforme à la réglementation. Il s’agit de fixer les conditions de déroulement d’une activité et d’éliminer ceux qui ne remplissent pas les conditions. Conditions de diplôme, d’inscription à un ordre professionnel. Multiplication des activités encadrées : activités bancaires et financières, assurances, agents immobiliers…
• Les régimes de déclaration (sans autorisation). Ex : ouverture d’un journal (loi du 29 juillet 1881)
• Les autorisations préalables : autorisation administrative pour exercer telle profession, cela permet de vérifier que la réglementation est bien respectée, de réguler le marché (éviter une concurrence trop sauvage) et d’assurer une répartition géographique cohérente du marché (ex : ouverture d’officines pharmaceutique). Cela assure aussi la sécurité des consommateurs. Pouvoir discrétionnaire ou pouvoir lié de l’administration. Ex : taxi
• Les régimes d’agrément : contrôle spontané puisque le particulier décide ou non de s’y soumettre. L’agrément comporte des avantages en contrepartie : subventions, détaxes, forfaits. Cela ne limite pas à proprement parler la LCI mais cela constitue une pression importante pour se prêter au contrôle
• Les monopoles publics : activités interdites aux entreprises privées sauf si elles sont délégataires du monopole. Motifs fiscaux (tabacs, allumettes…), politiques (monnaie…) ou administratifs (EDF, PTT). Mais le droit communautaire notamment contribue au démantèlement de nombreux monopoles
• Les interdictions : peu fréquentes, les seules interdictions générales et absolues sont des prohibitions liées au droit pénal (proxénétisme, trafic de stup…) Mais il existe un certains nombre de produits dont la fabrication et la mise sur le marché sont prohibées. Ex : absinthe, loi du 21/07/83 permet au pouvoir réglementaire d’interdire par décret pris en Conseil d’Etat, après avis de la commission de sécurité des consommateurs, les produits jugés dangereux pour les consommateurs.
On peut donc se demander dans quelle mesure ces atteintes sont légales et si elles ne remettent pas en cause le principe même de la LCI.
2. La LCI s’impose à l’administration + étude de sa valeur juridique
• Daudignac.
Exemple des photo-filmeurs : activité qui consiste à prendre par surprise des photographies de passants dans la rue. Profession qui se développe rapidement dans les 50’ et qui suscite les protestations des photographes en boutiques et des passants… Plusieurs municipalités vont réglementer ou interdire l’exercice de cette activité. Plusieurs arrêts et notamment Daudignac 22 juin 1951. Le maire de Montauban soumet cette activité à autorisation préalable assortie de nombreuses conditions… Mr Daudignac forme un recours contre cette réglementation qui avait pour principal fondement juridique l’art 97 de la loi du 5 avril 1884 (devenu L 2212-2 CGCT) d’après lequel le maire doit maintenir l’ordre dans la rue. Problématique traditionnelle : concilier l’exercice d’une liberté avec l’obligation qui incombe à l’autorité publique de maintenir l’ordre. Or la liberté en question était précisément la LCI et l’on pouvait se demander si les nombreuses atteintes qui lui avaient été portées depuis 1939 n’avaient pas fait disparaître le principe même de cette liberté. Conclusion de M. Gazier « là où aucune loi n’est intervenue, le principe de la LCI subsiste toujours, qui demeure le droit commun de l’activité industrielle en France » donc pas possible de soumettre à autorisation cette activité non réglementée par la loi. Le CE suit cette interprétation : la loi des 2-17 mars 1791 est citée dans les visas et la décision énonce le principe de la « LCI garantie par la loi ».
Dans d’autres arrêts, LCI = PGD. Ex : Président de l’Assemblée territoriale de la Polynésie française, CE Assemblée, 13 mai 1994
LCI = PGD, or: « les PGD, s’imposent à toute autorité réglementaire même en l’absence de disposition législative ». (CE, 26 juin 1959, Syndicat général des ingénieurs-conseils ). Pouvoir réglementaire autonome soumis aux PGD. (Rmq : le commissaire du Gouvernement Fournier sous Syndicat des ingénieurs… soutenait que l’évolution récente ne permet pas « de classer cette liberté parmi les règles fondamentales qui s’imposent à l’autorité réglementaire »)
• Il s’agit également d’une liberté publique (CE 28 octobre 1960, Laboulaye et CE Assemblée 16 décembre 1988, Association des pêcheurs aux filets et engins, Garonne, Isle et Dordogne : Considérant que la Constitution du 4 octobre 1958 dispose dans son article 34, que « la loi fixe les règles concernant … les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques » ; qu’au nombre des libertés publiques dont, en vertu de cette dernière disposition, les garanties fondamentales relèvent du domaine de la loi figure le libre accès à l’exercice par les citoyens de toute activité professionnelle n’ayant fait l’objet d’aucune limitation légale ».
Liberté publique : il revient au législateur de fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour son exercice. Le gouvernement ne peut donc porter atteinte au « libre accès à l’exercice par les citoyens de toute activité professionnelle n’ayant fait l’objet d’aucune limitation légale » : CE, 22 juin 1963, Syndicat du personnel soignant de la Guadeloupe (annulation d’un décret limitant l’accès à une profession antérieurement libre) + CE Assemblée 16 décembre 1988, association des pêcheurs… : annulation des dispositions d’un décret imposant des conditions de majorité et de capacité pour l’exercice de la profession de pêcheur).
• Parfois, le CE emploie directement l’expression « principe de la liberté du commerce » : CE Sect 23 octobre 1981, Ministre de l’éco contre Société Sagmar. Le principe semble ainsi déborder la loi du 2-17 mars 1791. « Principe de la LCI » est aussi visé dans CE, 9 nov 1988, Territoire de la Polynésie française : arrêté réglementant l’importation de ciment en Polynésie
• Question qui se pose actuellement : la LCI est-elle une liberté fondamentale au sens de l’art. L. 512-2 CJA, c a d dans le cadre du référé-liberté : selon cet art, en cas d’urgence, le juge peut ordonner toute mesure nécessaire à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un SP aurait porté une atteinte grave et manifestement illégale, dans l’exercice de ses pouvoirs. Absence de définition législative de cette notion. CE, ordonnance du 12 novembre 2001, Commune de Montreuil-Bellay : « la liberté d’entreprendre et la LCI qui est une composante de la liberté fondamentale d’entreprendre constituent des libertés fondamentales au sens de L512-2 CJA ». Plusieurs remarques : le CE fait de la LCI une composante de la liberté d’entreprendre alors que la majorité de la doctrine soutient le contraire. D’où pb : puisque la liberté d’entreprendre a valeur constitutionnelle, la LCI, si elle en est une composante devrait avoir la même valeur. Or, cela va à l’encontre de la jurisprudence du CE, qui affirme fréquemment que la LCI s’exerce dans les limites fixées par la loi. Autre pb : le CE ne considère pas toujours la LCI comme une liberté fondamentale. Ex : CE, ordonnance du 26 mars 2002, Société Route Logistique transports : demande de suspension d’un arrêté préfectoral qui retirait à une société les licences communautaires de transport qu’elle détenait (sanction fondée sur une loi de 1982 qui reconnaissait à l’autorité administrative la possibilité d’un tel retrait en cas d’infraction aux dispositions relatives aux transports, aux conditions de travail et à la sécurité). Selon le CE, « lorsque le préfet fait usage, dans les conditions et pour les motifs que la loi prévoit, de son pouvoir de retirer des licences précédemment accordées, il ne peut être regardé comme portant atteinte à une liberté fondamentale au sens de L. 512-2 CJA ». Nathalie Jacquinot propose 2 interprétations de cet arrêt : soit la LCI est une liberté fondamentale mais il n’y aurait pas d’atteinte en l’espèce, soit : une liberté est effectivement mise en cause mais elle est tellement encadrée qu’elle ne peut plus être considérée comme une liberté fondamentale. Difficile de soutenir qu’il n’y a pas d’atteinte à la LCI en l’espèce (puisque la société ne peut plus exercer son activité), donc il faut retenir la 2nde interprétation. De ce fait, la LCI ne serait une liberté fondamentale que dans certaines hypothèses. Il ne s’agirait pas d’une liberté fondamentale lorsqu’elle s’applique à une activité particulière et réglementée. En ce sens : CE, ord. 10 février 2003, Société d’exploitation AOM-Air Liberté : la LCI ne peut être invoquée comme liberté fondamentale pour des activités dont l’exercice est subordonné par la loi à l’octroi d’une autorisation.
Par ailleurs, le refus d’autoriser un établissement commercial à occuper le domaine public en vue d’y installer une terrasse, alors même que cela a une incidence sur l’attraction commerciale de l’établissement, ne peut être regardé comme portant atteinte à une liberté fondamentale. CE, ordonnance du 16 septembre 2002, Société EURL La cour des miracles
Principe à valeur législative et non constitutionnelle puisque son contenu est + ou – large selon les choix du législateur. Pour Moncef Kdhir, il a une valeur infraconstitutionnelle mais supraréglementaire dans la hiérarchie des normes
Rmq : pour autant, on peut soutenir que la LCI s’impose dans une certaine mesure au législateur puisque le CC a considéré que la liberté professionnelle est une liberté publique au sens de l’art 34 de la constitution (CC n°76-87 du 3 mars 1976) et que la liberté d’entreprendre a valeur constitutionnelle. Difficilement concevable qu’une loi qui supprime totalement la LCI puisse être compatible avec la Constitution.
Ainsi, il appartient au seul législateur de déterminer les secteurs éco où la LCI pourrait être nuisible et ceux dans lesquels son exercice doit être réglementé. Le CE refuse de reconnaître un tel pouvoir aux autorités administratives, sauf habilitation expresse. Par contre le CE s’incline devant les restrictions édictées par le législateur. Il convient donc d’examiner + en détails le régime des restrictions à la LCI.
B. Le régime juridique des restrictions à la LCI
On a vu que si le législateur pouvait porter atteinte au principe de la LCI, celui-ci s’imposait à l’administration.
(légalité de ces restriction est tributaire du respect du droit communautaire : liberté de circulation et d’établissement)
1. La LCI et la loi
La limitation résulte de dispositions que la loi permet à l’administration de prendre, dès lors, l’atteinte est considérée comme justifiée. G. Morange : chaque fois que « le législateur a manifesté sa volonté de supprimer ou de restreindre la liberté dans tel ou tel secteur, le juge n’admettra plus que sa violation puisse être utilement invoquée à l’appui d’une requête ». La LCI ne peut donc pas, en principe, être invoquée lorsque est en cause l’exercice d’une profession A nuancer.
CE Sect, 23 octobre 1981, Ministre de l’économie c. Société Sagmar : « la liberté du commerce ne s’exerce que dans les limites fixées par la loi ».
CE, 19 nov 1986, Société Smanor : « à supposer même que les dispositions du décret attaqué restreignent la liberté du commerce et de l’industrie, elles trouvent, en tout état de cause, une base légale dans la loi du 1er août 1905 … qui confie au gouvernement le soin de fixer la définition, la composition et la dénomination des marchandises de toute nature. » (décret réglementant les yaourts).
Le fait de soumettre une activité à autorisation administrative exclue-t-il tout appel à la LCI pour cette activité ? Au départ, le CE répond par la négative (CE, 29 juillet 1953, société générale des travaux cinématographiques) puis il admet qu’un tel régime est exclusif de toute liberté (CE, 12 décembre 1953, Syndicat national des transporteurs aériens : le principe de la LCI ne peut être utilement invoqué en ce qui concerne la profession de transporteur aérien, dès lors que cet exercice est subordonné nécessairement à l’octroi d’une concession ou d’une autorisation administrative)
Pour autant, même en présence d’une profession réglementée, le gouvernement ne peut pas soumettre l’accès à l’exercice de l’activité en cause à d’autres limitations que celles qui découlent des dispositions de la loi en cause : CE Assemblée, 16 décembre 1988, Association des pêcheurs …
Un décret ne peut pas non plus modifier le champ d’application d’une loi. CE, 22 mars 1991, Association fédérale des nouveaux consommateurs et Société Tousalon : loi du 30 décembre 1906 soumet les soldes à autorisation municipale, un décret du 22 septembre 1989 limite à 2 fois par an la possibilité de procéder à des soldes, pour une durée maximale de 2 mois… Annulation de ce décret en ce qu’il ajoute à la loi : « l’autorité réglementaire a excédé ses pouvoirs ».
Autre hypothèse, proche de celle dans laquelle la réglementation intervient en application d’une loi d’habilitation :
Réglementation fondée sur une intervention législative antérieure
Le juge estime que, quand des restrictions ont déjà été apportées par des lois dans un secteur éco donné, un règlement peut désormais introduire dans ce secteur des restrictions du même ordre (même niveau d’atteinte à la liberté). Le juge vérifie que la restriction respecte le principe de proportionnalité + même niveau d’atteinte
Dans Laboulaye, CE Section 28 octobre 1960 : pour les vins de table, aucune réglementation. A l’époque des faits, surproduction viticole donc le gouvernement décide de contingenter la production de vin de table, recours de Laboulaye contre ce décret, il dit qu’il fallait une loi. Le CE répond que le contrôle du rendement maximum à l’hectare s’applique déjà à d’autres qualités de vin donc on peut introduire par voie réglementaire des restrictions du même ordre.
CE Assemblée 19 juin 1964, Société des pétroles Shell-Berre : la loi du 30 mars 1928 conférait au gouvernement « dans l’intérêt de la défense et de l’économie nationale, un contrôle étroit sur l’activité des entreprises qui se livrent à l’importation de produits pétroliers en France » ; dès lors, cela autorisait le gouvernement à soumettre à un régime restrictif, non seulement les opérations d’importation directement visées par la loi, mais aussi les opérations de distribution et notamment la création et l’extension des stations-services. Décret légal selon le CE car cette restriction est du même ordre que celle résultant de la loi.
2. La LCI et les pouvoirs de police
Le pouvoir de police est expressément prévu par la loi des 2-17 mars 1791. La police administrative est la fonction de l’administration qui a pour but de faire régner l’OP, en imposant aux membres de la société des restrictions à leurs libertés publiques pour assurer la discipline qu’exige la vie sociale.
Concernant les autorités de police générale (maire, préfet):
Pouvoirs que le maire tire de l’art L 2212-2 CGCT (initialement définis par la loi du 5 avril 1884)
Possibilité pour les autorités de police de restreindre la LCI, sous conditions, est fréquemment rappelée par le CE :
Ex : CE, 22 juin 1963, Syndicat du personnel soignant de la Guadeloupe mais le maire détient « le pouvoir de prendre les mesures nécessaires pour remédier aux inconvénients qu’un mode d’exercice de la profession (…) peut présenter pour la circulation et l’OP
CE, 14 février 1945, Sieur Bessan : « le principe de la liberté du commerce ne peut faire obstacle à l’exercice normal des pouvoirs de police expressément consacrés par les lois et règlements »
En la matière domine le principe suivant, souvent rappelé par les commissaires du gouvernement : la liberté est la règle, la restriction de police l’exception.
Pour être légale la mesure de police doit donc avoir être justifiée par un objectif d’IG (donc nécessaire) et elle doit être strictement proportionnée.
• Un objectif d’IG doit justifier la restriction
Un maire ne peut faire usage de ses pouvoirs de police que pour porter atteinte à la LCI, que s’il justifie d’un IG, d’un intérêt supérieur. Ex : OP, sécurité, tranquillité, salubrité ou hygiène publiques, la liberté de circulation, la sécurité, la sauvegarde des intérêts des consommateurs
Les nécessités de l’OP permettent aux autorités de police de réglementer l’exercice des professions dans la mesure où il risque d’y porter atteinte : ainsi concernant les photographes-filmeurs, il existait des risques d’atteinte à l’OP (incidents entre les passants et les photographes, usage indiscret des photographies… + nécessités de la circulation), d’où légalité d’une réglementation limitée de la profession.
Un maire peut interdire l’ouverture d’une boulangerie-croissanterie de 22h à 6h du matin afin de préserver la tranquillité publique : CE, 7 juillet 1993, M. Cazorla
Les nécessités de la circulation sur les voies publiques peuvent légitimer des restrictions de police : CE, 9 nov 1951, Syndicat des commerçants étalagistes d’Ajaccio : possible pour le maire d’interdire l’exercice des professions d’étalagiste, marchand, forain, marchand ambulant et démonstrateur dans certaines rues ou à certaines heures ou de fixer des emplacements réservés à la vente.
Interventions dans un but socio-éco : (notamment après guerre)
Mesures destinées à assurer la fidélité du débit des denrées alimentaires et à empêcher l’accaparement ainsi que la hausse factice des prix : CE 30 mai 1952, Confédération nationale des producteurs de fruits et légumes
Ordre donné par un maire aux producteurs de lait de sa commune d’assurer la fourniture, au prix taxé, d’une quantité déterminée de lait à une famille : CE 22 février 1956, Estorgues. Le CE évoque « la sauvegarde des intérêts des consommateurs »
• Le respect du principe de proportionnalité
On fait application de la jurisprudence Benjamin, CE, 19 mai 1933 : les nécessités de l’OP permettent d’encadrer l’exercice de la LCI, à condition de ne pas lui porter une atteinte disproportionnée : contrôle de l’adéquation de la mesure aux faits.
Ex : CE, 22 février 1956, Sieur Estorgues : le maire ne peut apporter à la LCI « que les limitations strictement nécessaires » en l’espèce à la sauvegarde des intérêts des consommateurs.
Concernant les photographes-filmeurs : Contrôle étroit du CE sur l’action des autorités de police. Illégal d’interdire l’exercice de cette profession dans une zone comportant « l’ensemble des voies les + favorables » à cette activité et à l’intérieur de laquelle « la circulation s’effectue dans des conditions d’intensité et de difficulté très inégales », mais il est possible d’interdire cette activité « dans certaines rues ou à certaines heures où la circulation est particulièrement intense et difficile » (CE, 26 février 1960, Ville de Rouen et CE Sect 15 octobre 1965, Préfet de police c. Alcaraz. Considérée comme valable l’interdiction de cette activité sur toute la portion de route nationale conduisant au Mont-St-Michel et sur les aires de stationnement aménagées de part et d’autre de cette route pendant la saison touristique. Interdiction absolue validée car l’activité des photographes-filmeurs sur cette voie publique particulièrement encombrée, présentait des dangers auxquels il n’était pas possible de remédier par une mesure moins contraignante. (CE, 13 mars 1968, Ministre de l’intérieur c. Epoux Leroy)
CE 14 mars 1979, Auclair : le maire de Ramatuelle interdit la vente ambulante et le stationnement des véhicules aménagés pour la vente ambulante sur les plages de la commune et aux abords immédiats de l’une d’elle pendant la saison balnéaire. Objectif : tranquillité, OP et salubrité publique. Il s’agit en l’espèce d’une interdiction générale car elle concerne la zone la + favorable et couvre la période de l’année la + favorable à ce type d’activité. Selon le CE, une telle mesure est adaptée à la situation existant sur les plages mais l’interdiction générale ne se justifie pas aux abords de la plage de Pampelonne : arrêté municipal annulé sur ce point. Analyse concrète des circonstances de l’espèce. L’interdiction absolue n’est pas catégoriquement écartée. Bonne illustration de la jpce en la matière : contrôle du but poursuivi (ordre, tranquillité, salubrité publics) + contrôle de la proportionnalité de la mesure, or concernant une interdiction de caractère général, il y a une présomption d’inadéquation : il est exceptionnel qu’il n’existe aucune alternative moins attentatoire à la LCI. Interdiction générale licite seulement si elle est effectivement adaptée aux circonstances de l’espèce.
Autre exemple + récent : TA de Papeete, 2 décembre 2002, SA Brasserie de Thaïti c. Commune de Mahina : le maire d e Mahina interdit « en permanence sur l’ensemble du territoire de la commune la vente de boisson alcoolisées réfrigérées à emporter » : mesure motivée par un objectif d’IG : lutter contre la consommation d’alcool qui constitue un fléau en Polynésie française (accidents de la route, trouble à l’OP). Cette mesure, qui ne constitue pas une interdiction générale et absolue (car elle ne concerne que les boissons alcoolisées réfrigérées) est validée car l’objectif visé par le maire ne pouvait être atteint par une mesure moins contraignante. Prise en considération des circonstances de l’espèce.
La police domaniale peut aussi limiter les activités éco, elle est exercée par l’autorité propriétaire du domaine, objet : conservation de celui-ci (police spéciale). Société des autobus antibois, 29 janvier 1932 : le maire de Cannes interdit à toute voiture de transports en commun de stationner sur les voies publiques et de s’arrêter pour prendre ou laisser des voyageurs dans l’agglo de Cannes sans autorisation, et ce, afin de favoriser l’entreprise de transport locale. Recours de la société qui se voit dans l’impossibilité de continuer son exploitation. Selon le CE, le maire pouvait valablement protéger l’entreprise locale contre la concurrence d’autres entreprises en fixant des points d’arrêts obligatoires ou des itinéraires spéciaux mais l’arrêté est annulé parce qu’en interdisant tout arrêt à Cannes, il rend impossible la poursuite de l’activité de la société requérante. Le domaine public peut donc faire l’objet de réglementation dans un but de police mais également afin de mettre celui-ci en valeur.
D’une façon générale, dans le cadre de la gestion du domaine, le CE admet facilement des atteintes à la LCI dès lors qu’elles sont motivées par l’IG.
3. L’évolution récente : prise en compte du droit de la concurrence
Nécessité, pour les autorités de police de tenir compte de la LCI au sens large, du principe de libre concurrence
CE, Section, 26 mars 1999, Société EDA : l’autorité gestionnaire du domaine public doit veiller à n’accorder d’autorisation d’occupation que dans le respect du droit de la concurrence.
« Considérant que s’il appartient à l’autorité administrative affectataire de dépendance du domaine publique de gérer celles-ci tant dans l’intérêt du domaine et de son affectation que dans l’IG, il lui incombe en outre, lorsque conformément à l’affectation de ces dépendances, celles-ci sont le siège d’activité de production, de distribution ou de services, de prendre en considération les diverses règles, telles que le principe de la LCI ou l’ordonnance du 1er décembre 1986, dans le cadre desquelles s’exercent ces activités ; qu’il appartient alors au juge de l’excès de pouvoir, à qui il revient d’apprécier la légalité des actes juridiques de gestion du domaine public, de s’assurer que ces actes ont été pris compte tenu de l’ensemble de ces principes et de ces règles et qu’ils en ont fait, en les combinant, une exacte appréciation»
L et P publicité, Avis CE 22 nov 2000 : TA de Pau interroge le CE pour avis (fondement : art 12 de la loi du 31 décembre 1987) : lorsque l’Administration prend une décision de police affectant directement les activités éco dans un secteur concurrentiel, doit-elle tenir compte des règles de concurrence ?
Réponse : « Dès lors que l’exercice de pouvoirs de police et susceptible d’affecter des activités de production, de distribution ou de services, la circonstance que les mesures de police ont pour objectif la protection de l’OP ou, dans certains cas, la sauvegarde des intérêts spéciaux que l’administration a pour mission de protéger ou de garantir n’exonère pas l’autorité investie de ces pouvoirs de police de l’obligation de prendre en compte également la LCI et les règles de concurrence »
La police de l’affichage qui a pour objectif la protection du cadre de vie ne peut s’exercer sans tenir compte de son impact sur l’activité éco qu’est l’affichage. Lorsqu’il réglemente cette dernière sur le territoire de sa commune, le maire doit veiller à ce que les mesures de police ne portent aux règles de concurrence que les atteintes justifiées au regard des objectifs de la réglementation de l’affichage.
Dans la lignée de la jurisprudence Million et Marais : l’ordonnance de 1986 fait partie des dispositions dont le respect est une condition de la légalité des actes administratifs. Le droit de la concurrence (et pas seulement l’ordo de 86 car la formule employée par le CE est + large) est opposable aux activités éco des collectivités publiques, mais encore à leur activité normative.
Mais évolution importante tant la police administrative, domaine traditionnel du droit administratif, semble éloignée des préoccupations du droit de la concurrence. Il s’agit ici d’une police spéciale, la police de l’affichage mais le considérant du CE est très général et semble viser l’ensemble des mesures de police administrative susceptible d’affecter une activité éco : or de très nombreuses mesures de police peuvent avoir des effets indirects sur le jeu de la concurrence (modifier le plan de circulation d’une ville…). On s’intéresse désormais aux effets de la mesure et non plus seulement à son objet.
Pour certains, « approfondissement d’un contrôle existant », celui des atteintes excessives au principe de la LCI (Stahl sous EDA), mais on peut considérer que par cet avis le CE va bien + loin : l’autorité de police doit désormais concilier les impératifs de la concurrence avec les nécessités de l’OP.
Prise en compte du droit de la concurrence : le principe de la LCI s’étoffe, il ne s’agit plus seulement d’empêcher l’administration de limiter le libre accès et le libre exercice à toute activité éco, il s’agit désormais de veiller à ce qu’elle ne fausse pas, par des prescription, le libre jeu de la concurrence sur le marché.
Si l’administration ne doit pas troubler le libre jeu de la concurrence lorsqu’elle prend des mesures de police, elle ne doit pas le faire non plus par ses interventions sur le marché. (II)
II. La LCI et l’intervention des personnes publiques
A. Protection de la LCI et non intervention des personnes publiques
1- La LCI a été interprété dans un premier temps comme un principe de non intervention des personnes publiques
A la fin du 19 et au début du 20 sc. se produisit un développement considérable de l’interventionnisme des collectivités locales en matière économique et sociale
La plupart de ces services sont des services de type industriel et commercial qui fournissent un bien ou une prestation contre rémunération .ce mouvement a été appelé le « socialisme municipal ».
Selon le CE, les activités de caractère économique, »les professions » sont des activités qui relèvent par nature de l’initiative privée et il est la en adhésion avec l’idée libérale de l’existence d’une division naturelle et nécessaire du travail dans la société entre ce qui relève des personnes publiques et ce qui relève des personnes privées.
Hauriou affirmait a ce sujet que le pce de LCI n’est pas respecte si les administrations interviennent dans le domaine économique de ce fait que « les administrations peuvent travailler sans faire de bénéfices et jouissent grâce aux contribuables de ressources illimitées »
C’est pour ces raisons et afin de lutter contre cet interventionnisme grandissant que le CE a utilise le décret d’allarde du 2 et 17 mars
Le CE va interpréter ce texte comme affirmant non seulement le principe de liberté du commerce et de l’industrie pour les personnes privées mais encore, en filigrane, celui de la libre concurrence, comme une reconnaissance du droit pour ces personnes de ne pas être concurrencées dans l’exercice de leurs activités professionnelles par les personnes publiques .
La LCI implique la liberté de concurrencer autrui sans être défavorisé par rapport à lui.
Les collectivités locales ne peuvent créer des services publics que pour autant qu’elles ne portent pas atteinte au pce de LCI et qu’elles ne font pas concurrence à l’initiative privée.
Elles doivent se cantonner à l’accomplissement d’activités supposées publiques « par nature »
Le pouvoir des collectivités locales de fonder des services publics rencontre donc comme principale limite le principe de lci
Le CE pour s’assurer du respect de la liberté du commerce et de l’industrie par les collectivités publiques va adopter une politique jurisprudentielle qui leur impose de n’exercer une activité susceptible d’être assurée par une personne privée qu’a titre exceptionnel
Ainsi la création de sp à caractère économique est en principe subordonnée à l’existence de circonstances exceptionnelles.
La réalisation de cette condition sine qua non se trouve satisfaite dans deux hypothèses :
.La première concerne la carence ou l’insuffisance de l’initiative privée
Pour la carence/illégalité de la création d’1 service médical gratuit par une commune des lors qu’un médecin exerce sur le territoire de la commune/CE 1901 CASANOVA
La deuxième hypothèse est l’exploitation du service dans des conditions telles qu’elles n’engendrent pas de concurrence pour les entreprises privées fournissant des prestations analogues ex le CE a ainsi jugé que la création par la ville de Paris d’un établissement de bains gratuits est légale des lors que les bains parce que gratuits « ne pouvaient être considérés comme l’objet d’un commerce ou d’une industrie »
Il n’y avait donc pas de concurrence avec les bains privés, l’idée est que la clientèle de ceux-ci ne fuira pas vers les bains publics (la solution aurait été différente dans une petite commune ou n’aurait existe qu’1 Ets de bains privés)
Ces deux hypothèses ont un point commun celui de ne pas faire concurrence aux entrepreneurs privés.
Il existe cependant deux exceptions au principe jurisprudentiel
CE admet la légalité de la création d’1 sp des lors que celui-ci relève des missions incombant « naturellement » aux personnes publiques
La création est également admise lorsque le service à rendre au public suppose l’utilisation du domaine public et ne peut être organisé qu’en réseau, avec un monopole de fait(tramways distribution de gaz électricité eau) :il ne s’agit que d’assurer au mieux les intérêts des usagers et le conseil considère comme légitime que la commune prenne la direction de l’entreprise.
Est ainsi légal la création d’activités accessoires à un service public légal.
Mais en dehors de ces hyp , service concourant à un but de police service occupant le DP avec monopole , acté accessoire ,la création d’un sp par les collectivités locales n’est légales que s’il y a carence de l’initiative privée
Le commissaire du gouvernement Corneille dans ses conclusions relatives à l’affaire Syndicat des agents généraux des compagnies d’assurances du territoire de Belfort de 1921 indique que la jurisprudence du CE pose « le principe net et précis qu’une assemblée locale ne peut modifier les conditions générales du régime économique en faisant, avec le poids des moyens administratifs dont elle dispose concurrence à l’initiative privée » et qu’ainsi « ce n’est qu’a défaut de l’initiative privée que ,pour la satisfaction des besoins généraux de la collectivité , l’administration locale pourra exceptionnellement intervenir »
_lorsqu’une satisfaction convenable des besoins collectifs des habitants est assurée par des industriels ou des commerçants, il n’y a pas d’intérêt collectif a satisfaire et il n’y a donc pas de base légale au service voulu comme service public
D’ailleurs si les conditions ayant justifie la création d’1 sp disparaissent il en résulte pour la pp locale concernée l’obligation de faire disparaître
Cette attitude restrictive fut remise en cause par les autorités publiques de la république
1 décret de 1926 disposait que « les communes et les syndicats de communes peuvent être autorises à exploiter directement des services d’intérêt public a caractère industriel et commercial »et que « sont considérées comme industrielles et commerciales les exploitations susceptibles d’être gérées par des entreprises privées… »
A la suite de ce décret le conseil municipal de Nevers avait autorise le maire a créer un service municipal de ravitaillement en denrées de toute sorte .Cette entreprise avait été concédée et la municipalité espérait ainsi enrayer la montée du coût de la vie.
Le CE appliqua aux faits de l’espèce les principes qui régissaient sa jp avant la publication des décrets,et, constatant que la ville de Nevers n’invoquait aucune circonstance particulière mais seulement la lutte contre la vie chère,il annula les délibérations attaquées.
Dans cet arrêt du 30 mai 1930 le Ce considère que « les entreprise ayant un caractère industriel et commercial restent en règle générale, réservées à l’initiative privée et que les conseils municipaux ne peuvent ériger des entreprises de cette nature en sp communaux que si en raison de circonstances particulières de temps et de lieu ,un intérêt public justifie leur intervention en cette matière. »
Donc le principe fondamental c’est que les ent a caractere commercial restent a l’initiative privée
L’exception c’est l’intervention si circonstances particulières de temps et de lieux et si intérêt public le justifie.
Cet intérêt public exige la réunion de deux conditions
.l’existence d’un besoin de la population dès lors que ce besoin possède un lien avec l’intérêt général
.l’absence de prise en charge convenable du besoin par l’initiative privée.
Certains auteurs ont considéré qu »il s’agissait d’un infléchissement de la part du CE puisque des raisons part se substituaient aux circonstances exceptionnelles
Cet arrêt s’il pose des conditions strictes n’en demeurent pas moins le point de départ d’un infléchissement de la jp concernant l’intervention des PP
2. Un inflechissement de la jp favorable à une extension des initiatives publiques
→ une définition souple du principe de LCI
comme on vient de le voir l’arrêt ch. de commerce en détail de Nevers pose deux conditions
-le carence ou l’insuffisance de l’initiative privée
-un intérêt public qui justifie l’intervention
L’infléchissement a dans un premier temps porté sur la carence ou l’insuffisance de l’initiative privée
S’ajoute à l’insuffisance quantitative de l’initiative privée comme élément constitutif de la défaillance, l’insuffisance au plan qualitatif
L’initiative privée peut exister mais si elle n’est pas telle que les besoins public peuvent être convenablement satisfait, pourront alors être constatées des circonstances justifiant l’intervention publique. Cette défaillance va pouvoir être quantitative qualitative ou résulter de l’éloignement des commerçants privés ou du caractère élevé des prix pratiqués.
D’autre part la conception des besoins a satisfaire a été assouplie et élargie : ne concerne plus seulement comme dans les années 30 les commerces d’alimentations ou la constitution de soc de gestion immobilières pour combattre la crise du logement.
Le CE apprécie de façon de moins en moins rigoureuse les conditions précitées
Les besoins de la population sont entendus de plus en plus largement et il se montre peu exigeant pour admettre l’absence ou la défaillance de l’initiative privée.
Quelques solutions jplles illustrant parfaitement cette tendance
-légalité de la création d’1 théâtre municipal faisant prévaloir les intérêts artistiques sur les intérêts commerciaux de l’exploitation :CE 1944 LEONI
-création d’un théâtre municipal de verdure destine a « mettre pendant les mois d’été et pour un prix modique a la disposition de la population de larges possibilités de distraction en plein air » :CE 1959 SYNDICAT DES EXPLOITANTS DE CINEMATOGRAPHES DE L’ORANIE
– La création par une commune d’un cabinet dentaire municipal ouvert à l’ensemble de la population locale a été jugée légale en appel, alors que le tribunal administratif l’avait annulée au motif que l’insuffisance d’initiative privée n’était constituée que pour que pour les catégories modestes de la population .Cette prestation publique « répondait à un besoin de la population et par la suite a un intérêt public local », des lors qu’il y avait « carence de l’équipement hospitalier et insuffisance du nombre des praticiens privés »étant ajouté que ceux-ci affichaient « pour la plupart des tarifs supérieurs aux tarifs de remboursement de la sécurité sociale, la plus grande partie de la population était condamnée a renoncer aux soins dentaires »
Il faut remarquer que le cabinet était légalement ouvert à tous , conformément au principe d’égalité .Le fait qu’il réalise tous les soins dentaires, y compris non rembourses par la sécurité sociale , et qu’il profite aussi aux catégories de population plus favorisée n’est pas de nature a détourner l’activité de « son objectif d’intérêt public ni, par suite, à porter une concurrence illégale aux chirurgiens dentistes de la ville »
-création dans le même ordre d’idée d’un service communal destine notamment « à fournir aux habitants des renseignements juridiques et à les orienter vers les services administratifs, les juridictions ou les hommes de loi compétents »et confie a un avocat s’interdisant de d’accepter comme client la pers qui l’aurait consultée est légale
Les motifs retenus par le juge sont d’une part que ce service, dans les conditions ou il était organisé « répondait à un besoin de la population et donc à un intérêt public local » d’autre part que « en outre, il n’était pas de nature à porter illégalement atteinte à l’activité des membres des professions juridiques des villes voisines » :CE 1970 COMMUNE DE MONTMAGNY
Les conclusions du comm du gvt y opéraient un rapprochement avec l’arrêt ville de Nanterre car les deux affaires concernaient le domaine des services sociaux et des professions non commerciales
S’agissant d’activités proprement industrielles et commerciales , le juge administratif a reconnu la légalité de la création d’un café hôtel restaurant destiné a permettre « l’organisation des repas collectifs et des réunions que comportait normalement la vie administrative et sociale de ce chef lieu de canton « du fait » qu’il n’était pas suffisamment pourvu à cet intérêt communal eu égard au mauvais état d’entretien et aux interruptions de fonctionnement de l’unique hôtel bar restaurant existant » :CE 1986 COMMUNE DE MERCOEUR
Par ailleurs un sp. ind. et comm. peut être aussi exploite par une coll publique dans la mesure ou il constitue le prolongement temporel ou matériel, d’un service existant.
depuis 1933 et c’est l’arrêt du CE LAVABRE le CE admet le maintien d’un service municipal, quel que soit son degré de nécessite , pendant le temps utile à l’amortissement des investissements ,lorsque les circonstances justifiant sa création ont disparu :maintien des boucheries municipales crées a Millau en 1927 pour lutter contre une hausse excessive des prix. :solution guidée par la recherche de l’équilibre financier
De ce prolongement temporel on passe à un prolongement permanent pour des activités s’ajoutant utilement à celles dont l’exploitation par les personnes publiques est justifiée a titre Ppal.
Les communes peuvent ainsi au delà du monopole des pompes funèbres que leur attribuait la loi , assurer des prestations funéraires complémentaires :CE 1988 MEZY
Elles peuvent aussi compléter un parc de stationnement par une station service :CE 1959 DELANSORME
Les mêmes solutions se retrouvent pour les autres pers pubq Arrêt CE 1942 MOLLET avec la création de la cite universitaire de Paris, qui constitue le « complément du sp de l’enseignement »
La question de l’extension des activités publiques se pose pour les entreprise publiques toutefois elle ne se pose pas seulement au regard du pce de LCI mais également au regard du pce de spécialité
A ce titre le CE a considéré dans un avis du 7 juill. 1994 à propos d’EDF GDF que « la pers morale dont la création a été justifiée par la mission qui lui a été confiée, n’a pas de compétence générale au delà de cette mission.
Il n’appartient pas à l’établissement d’entreprendre des activités extérieures a cette mission ou de s’immiscer dans de telles activités .Cela n’interdit pas à l’Ets pub d’exercer des act qui sont le complément de sa mission et qui présentent un intérêt direct pour l’amélioration des conditions d’exercice de celles-ci
Il peut donc se livrer à d’autres acté eco à condition qu’elles soient techniquement et commercialement le complément normal de sa mission statutaire ppale.
ON remarque donc d’après l’ensemble de ces solutions jurisprudentielles que le principe de Lib du comm. et de l’ind. entendu comme pce de non intervention a perdu de sa force
Si le juge ad utilise toujours ce pce pour limiter les interventions des collectivités comme par ex TA Nancy 1999 il n’en demeure pas moins que ce principe a vu son contenu se modifier pour admettre les initiatives publiques
La jurisprudence du CE s’est montré beaucoup plus favorable aux initiatives publiques.
Toutefois ce laxisme s’est vu accompagné par l’émergence d’un nouveau principe d’égale concurrence entre les opérateurs.
B / Protection de la LCI et principe d’égale concurrence
1. La non discrimination entre opérateurs publics et prives
Comme on vient de le voir jusqu’à présent le CE a cru pouvoir tirer la conclusion que la LCI imposait un devoir d’abstention aux collectivités publiques car leur poids spécifique du fait notamment de leur privilège régaliens risquerait de fausser le libre jeu de la concurrence
Le contraste comme l’a fait remarquer M Lombard est net avec le droit communautaire :
On admet en droit français que l’accès des opérateurs publics au marche puisse être tout a la fois limité et privilégié d’ailleurs l’accès au marché doit être limité parce que privilégie
Tandis que l’accès des opérateurs publics au marche, en droit communautaire, ne connaît aucune limitation de principe. C’est sans doute parce qu’il ne saurait, sauf exception s’accompagner de privilèges spécifiques. Finalement l’accès au marche des op. pub y apparaît illimité parce que non privilégié
C’est notamment ce qu’exprime l’art 222 du traite de Rome aux termes duquel »Le présent traité ne préjuge en rien le régime de la propriété dans les états membres ».
Il exprime en effet une neutralité de principe à l’égard de la propriété publique ou privée des entreprises.
C’est ainsi qu’il a été précisé que « les Etats membres ont le droit de nationaliser certaines de leur entreprises et même des pans entiers de leur économie sans que la communauté n’ait jamais à intervenir dans ces décisions ni à en remettre en cause le principe.
Ce principe, qui interdit d’exercer aucune discrimination à l’encontre des pers publique a, en effet pour corollaire le principe d’égalité de concurrence entre opérateurs publics et opérateurs prives.
D’ailleurs on peut rappeler que ce que suggérait le commissaire de gouvernement Raphaël Alibert dans ses conclusions sur l’arrêt chambre syndicale du commerce en détail de Nevers .
Le texte (le décret d’Allarde) accorde de manière incontestable la liberté commerciale mais il ne la réserve pas aux individus et l’on pourrait conclure de sa généralité qu’il profite aux personnes morales aussi bien qu’aux autres ;les communes pourraient des lors être fondées à s’en prévaloir
Martine lombard précise dans un article de 1994 que le conseil d’état a dans sa décision de 1930 a procédé a une interprétation de grande envergure.
Celui-ci a en effet décider non seulement que la liberté proclamée par ce texte ne bénéficie pas aux collectivités locales, mais encore qu’il leur interdit expressément la liberté qu’il proclame.
Il a donc été fait une interprétation trop extensive du principe de LCI qui doit selon un grande partie de la doctrine être révisée dans ses fondements
En effet ce principe de non intervention doit d’autant plus être reconsidéré qu’aujourd’hui les opérateurs privés sont admis à concurrencer de plus en plus largement les opérateurs publics, de par la réduction progressive de leur monopole.
On remarque qu’au delà de la particularité de l’objet de certains services , en droit interne les collectivités publiques pouvaient déjà concurrencer directement les entreprises privées dans le cas ou elles agissent pour elles mêmes.
Elles ont toujours pu produire pour elles mêmes les prestations dont elles ont besoin, sans qu’elles aient a recourir au marché (
CE 1970 SOCIETE UNIPAIN :une boulangerie militaire peut fournir du pain à des établissements pénitentiaires
La cour de justice admet dans le même sens , qu’une collectivité publique peut, sans observer les règles d’attribution des marches publics, passer commande à une personne sur laquelle elle exerce un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services et qui réalise l’essentiel de son activité. CJCE TECKAL 1999
Mais elles ne pouvaient toujours pas agir pour d’autres collectivités
L’ensemble de ces éléments a poussé le CE à abandonner ce principe de non concurrence pour chercher un autre moyen de faire respecter la libre concurrence aux pp que de leur interdire purement et simplement l’entrée sur le marche
2 L’égalité de concurrence entre opérateurs publics et prives.
Pas à pas et vu qu’une partie de la doctrine considérait que la libre concurrence et plus largement la liberté du commerce et de l’industrie serait mieux assurée s’il était imposé aux PP non une obligation au demeurant bien peu réaliste d’abstention mais le devoir de se comporter à l’instar de tout opérateur ordinaire des lors que la finalité de leurs activités industrielles et commerciales ne justifient pas qu’elles bénéficient de prérogatives ou de protection exorbitantes.
Autrement dit, le principe de non concurrence pourrait être avantageusement remplacé par un principes d’égale concurrence entre les opérateurs publics et privés à l’instar du droit communautaire.
Le CE semble avoir suivi cette doctrine dans sa décision du 16 oct. 2000 Compagnie méditerranéenne d’exploitation des services d’eau par laquelle il juge qu’un établissement public peut se porter candidat à l’attribution d’une délégation de service public, sans violer le principe de liberté du commerce et de l’industrie.
Plus généralement le CE dans son avis du 8 novembre 2000 Soc JL Bernard Consultants a considéré qu’il résulte du principe de LCI qu’un établissement public peut librement candidater à l’attribution d’un marché public ou une convention de délégation de service public des lors qu’il n’utilise pas de ses avantages structurels dont il est éventuellement doté à raison de ses missions de service public.
« aucun texte ni aucun principe n’interdit en raison de sa nature à une personne publique , de se porter candidate à l’attribution d’un MP ou d’une DSP »
Si la solution du conseil d’état s’inscrit parfaitement dans le cadre du droit communautaire, elle contredit en revanche la position de la commission centrale des marchés qui avait étendu au domaine des marchés publics la jurisprudence relative à la création des services publics.
Le droit de l’intervention économique publique , qui reposait sur un principe de non concurrence entre les activités publiques et privées, cherche désormais un autre fondement dans le principe d’égale concurrence entre les opérateurs économiques intervenant sur un marché, quel que soit leur statut public ou privé.
C’est donc en raison de l’égalité des conditions d’intervention des collectivités publiques que celles-ci peuvent concurrencer les entreprises privées
En effet dans son avis de 2000 le CE a observé que les obligations fiscales et sociales auxquelles la pers pub est soumise sont comparables à celles des entreprises privées.
Plus généralement « pour que soient respectés tant les exigences de l’égal accès aux MP que le principe de liberté de concurrence qui découle notamment de l’ordo de 1986 , l’attribution d’un MP ou d’une DSP à un EPA suppose, d’une part que le prix proposé par cet EPA soit déterminé en prenant compte l’ensemble des coûts directs et indirects concourant à la formation du prix de la prestation objet du contrat, d’autre part, que cet EP n’ait pas bénéficié , pour déterminer le prix qu’il a proposé , d’un avantage découlant des ressources ou des moyens qui sont attribués au titre de sa mission de service public et enfin qu’il puisse si nécessaire , en justifier par ses documents comptables ou tout autre moyen d’information »
RQ : certaines aides peuvent être destinées à rétablir l’égalité
Le jp communautaire admet que les contraintes pesant spécialement sur les sp et que ne subissent pas les entreprises privées puissent être compensées
Par ailleurs la jp communautaires veille également a contrôler les aides afin de faire respecter l’égalité de concurrence par les opérateurs publics
Conclusion au principe de non concurrence des entreprises privées par les pers publiques retenu par l’arrêt chambre de commerce en détail de Nevers l’évolution jurisprudentielle tant en droit administratif qu’en droit communautaire aboutit à substituer aujourd’hui celui de l’égale concurrence entre personnes publiques et personnes privées.