La théorie du changement de circonstances connait son origine première dans l’arrêt « Despujol » du 10 janvier 1930 :
» Considérant qu’il appartient à tout intéressé, dans le cas où les circonstances qui ont pu motiver légalement un règlement municipal ont disparu, de saisir à toute époque le maire d’une demande tendant à la modification ou à la suppression de ce règlement et de se pourvoir, le cas échéant, devant le Conseil d’Etat contre le refus ou le silence du maire : mais que, s’il entend former devant ledit conseil un recours direct tendant à l’annulation pour excès de pouvoir du règlement lui même, il doit présenter ce recours dans le délai de deux mois à partir de la publication soit de l’arrêté attaqué, soit de la loi qui serait venue ultérieurement créer une situation juridique nouvelle. »
L’arrêt Despujol s’attaquait à un problème sérieux, celui de la résistance d’arrêtés illégaux n’ayant pas été sanctionné par la voie d’un recours en excès de pouvoir.
Il introduit deux choses :
# Tout d’abord en cas de changement dans les circonstances de fait , les administrés peuvent demander l’abrogation ou la modification du règlement, sans condition de délai pour cette demande. Cette jurisprudence visait à empêcher de laisser perdurer un règlement ayant perdu toute justification légale. On peut remarquer que cette théorie du changement de circonstances de fait a été élargie ensuite, mais de manière restrictive, aux activités économiques…
# Ensuite en cas de changement dans les circonstances de droit, le décret peut, selon cet arrêt être annulé, mais dans le délai de deux mois. Ca a certes un intérêt pour juger de la légalité du règlement contesté, et en cas de loi nouvelle également. Mais le conseil d’Etat précisera néanmoins justement la notion dans un arrêt, en parlant non plus d’annulation mais d’abrogation, et étendra la portée de cette jurisprudence en acceptant que cette théorie soit invoquée par voie d’exception (ceci étant valable également pour les changements de circonstances de fait), les conditions de temps sont alors réellement atténuées par l’arrêt « Butin » du 22 janvier 1982.
Ces conditions de temps seront entièrement détruites par l’arrêt Alitalia du 3.2.1989 (qui reprend le texte du décret du 28.11.1983 dont la légalité était douteuse), qui permet aux administrés de demander l’abrogation à toute époque d’un règlement illégal, que son illégalité soit initiale ou qu’elle résulte d’un changement de circonstances, à travers l’affirmation d’un nouveau principe jurisprudentiel.
Dernière mise à jour : 21 août 1997