La démocratie peut se définir comme le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple. Autrement dit, la source du pouvoir se situe dans le peuple qui s’exprime par le suffrage universel. La démocratie, ici entendue dans son sens pluraliste et libéral, suppose la réunion de certaines conditions. Ainsi, le peuple doit véritablement avoir un pouvoir de décision; en d’autres termes, il doit avoir le choix, ce qui implique le pluralisme politique, seul système permettant au peuple de choisir ses représentants. Cette donnée va de pair avec le libéralisme politique caractérisé par les libertés fondamentales, comme la liberté de la presse et celle de la communication.
I – La participation du citoyen au pouvoir
A – Souveraineté nationale et souveraineté populaire
Cette distinction renvoie à la question du titulaire de le souveraineté : ainsi, la souveraineté nationale l’attribue à la nation, tandis que la souveraineté populaire l’attribue aux citoyens.
La souveraineté nationale peut se définir, selon le professeur Pactet, comme la souverainté « confiée à la Nation, etre collectif et indivisible, distinct des individus qui le composent ». Cette conception est consacrée par l’article 3 de la Déclaration de 1789. La souveraineté est ici affectée de certains caractères : elle est une, indivisible, inaliénable et imprescriptible. Cela signifie que la souveraineté appartient toute entière à la nation, et non à une partie des citoyens, ou à l’ensemble des citoyens pris isolément. Par ailleurs, la nation peut déléguer cette souverainté à des représentants, mais uniquement de manière temporaire. Cette conception suppose donc un régime représentatif. A ce propos, les élus représentent la nation toute entière, et non pas leurs électeurs, ce qui interdit le mandat impératif. Par ailleurs, le pouvoir de choisir les représentants n’est pas un droit, mais une fonction qui est déléguée aux électeurs par la nation; cette dernière est libre de ne pas l’accorder à tous les citoyens, ce qui autorise, alors, le suffrage censitaire.
La souveraineté populaire appartient aux citoyens, mais elle est fractionnée entre tous les individus. Cette conception emporte certaines conséquences. Ainsi, en premier lieu, elle n’implique pas nécessairement un régime représentatif; en d’autres termes, elle autorise la démocratie directe ou semi-directe. Par ailleurs, pour les citoyens, le vote est un droit et non une fonction; ce qui implique le suffrage universel. Enfin, les élus représentent les électeurs de leur circonscription, et le mandat impératif ou la révocation des élus sont possibles.
La plupart des démocraties combinent ces deux conceptions. Ainsi, en France, l’article 3 de la Constitution de 1946 postule que « la souveraineté nationale appartient au peuple ». Le régime emprunte, alors, des éléments à chacune des deux conceptions. Ainsi, le mandat impératif est interdit, et chaque élu représente la nation. Mais, les idées propres à la souveraineté populaire ont progressé : le suffrage est universel, l’électorat est un perçu comme un droit, et les procédés de démocratie semi-directe se sont développés.
B – Démocratie directe et démocratie représentative
La démocratie directe correspond à un régime ou le peuple exerce directement le pouvoir. Ce type de régime n’est applicable que dans les Etats fort peu peuplés, ce qui implique qu’on ne le rencontre que très rarement. Ces procédés peuvent etre utilisés au niveau local, comme cela a été le cas dans quelques cantons suisses il y a quelques années.
A l’inverse la démocratie représentative implique la désignation de représentants, élus au suffrage universel, qui sont chargés de décider au nom de la nation. Dans ce système, l’élu est libre de ses décisons, mais il représente la nation toute entière et non ses électeurs. Ce système implique la désignation des parlementaires par les électeurs. Alors que les organes exécutifs peuvent, selon les cas, etre désignés soit par les parlementaires, soit directement par le peuple. Dans le premier cas, les parlementaires sont, alors, dotés d’un prestige dont ne disposent pas les organes exécutifs. Ce système suppose, par ailleurs, l’émergence de partis politiques. Mais, il connait dans certains cas des déviances. Ainsi, dans certaines hypothèses, les parlementaires peuvent ne plus tenir compte des choix des électeurs, la souveraineté appartient, alors, véritablement au Parlement. De plus, dans un système ou les partis politiques sont bien établis, la discipline de vote peut faire de ces derniers la véritable autorité de décision, affaiblissant ainsi les pouvoirs du Parlement.
C – La démocratie semi-directe
Ce type de régime combine système représentatif et possibilité pour le peuple de décider directement. De nos jours, ces procédures d’intervention populaire ne cessent de se développer.
Au titre de ces procédures, figure au premier rang le référendum c’est-à-dire la soumission au peuple d’un projet de texte constitutionnel ou légisaltif. L’initiative de cette procédure peut etre laissée à la discrétion des gouvernants ou imposée par les textes. Lorsque la réponse à la question posé se fait, non sur la base du texte soumis, mais sur celle de la personnalité de l’auteur du texte, il y a, dans ce cas, plébiscite. C’est le cas lorsque l’auteur de la question fait dépendre son maintien en fonction de la réponse donnée par les électeurs, ou lorsqu’il y a une forte concentration des pouvoirs entre les mains d’un seul organe.
Une autre procédure est constituée par le véto populaire. Celui-ci permet au peuple, après dépot d’une pétition et organisation d’un référendum, de demander l’abrogation d’une loi. Cette technique peut se muer en révocation populaire, selon les memes conditions, lorsqu’il s’agit de mettre fin au mandat d’une autorité.
La dernière technique est l’initiative populaire qui permet au peuple, après dépot d’une pétition, d’adopter un texte constitutionnel ou légisaltif. Concrètement, le projet est soumis au Parlement, et si son vote est négatif, le projet est soumis au référendum. Cette technique est utilisée en Suisse. Ainsi, le peuple peut demander la révision totale de la Constitution par le dépot d’une pétition signée par 100 000 personnes. Par la suite, un référendum est organisé pour savoir s’il y a lieu ou non de réviser la Constitution. En cas de réponse positive, les assemblées élaborent le projet de révision, qui est ensuite soumis au peuple par la voie du référendum.
L’exemple du référendum législatif français de l’article 11
L’article 11 de la Constitution de 1958 permet au Président de la République de soumettre au peuple par référendum tout projet de loi relatif à l’un des trois domaines suivants : l’organisation des pouvoirs publics, des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourrent, et l’autorisation de ratifier un traité.
Le Président de la République ne peut recourir au référendum que sur proposition conjointe des deux assemblées, ou sur proposition du gouvernement, pendant que le Parlement est en session dans ce dernier cas. La révision constitutionnelle du 23 Juillet 2008 a rajouté une troisième hypothèse combinant référendum classique et droit de pétition. Concrètement, un référendum peut etre organisé à l’initiative d’un cinquimème des membres du Parlement soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales. Cette initiative est encadrée. Ainsi, elle ne peut porter sur l’abrogation d’une loi promulguée depuis moins d’un an. De plus, si la proposition de loi n’a pas été examinée par les deux assemblées dans un délai fixé par une loi organique, le Président de la République la soumet au peuple par référendum. Par ailleurs, en cas de rejet du peuple, aucune proposition de référendum portant sur le meme sujet ne peut etre présenté avant l’expiration d’un délai de deux ans.
La procédure est la suivante. En cas de proposition de référendum venant du Gouvernement, un débat sans vote doit avoir lieu dans chaque assemblée. Ce débat porte sur l’objet du référendum et non sur son opportunité ou sa constitutionnalité.
Ensuite, la décision de recourir au référendum, qui ne peut faire l’objet d’aucun recours, est prise par le chef de l’Etat qui dispose d’un pouvoir propre. Celui-ci peut donc décider de ne pas donner suite aux demandes de l’assemblée ou du Gouvernement. Mais, la mise ne pratique de ce pouvoir dépend étroitement de la conjoncture politique. Par ailleurs, en cas de référendum provenant d’une initiative partagée entre parlementaires et peuple, le pouvoir du Président de la République est nul : le recours au référendum s’impose à lui.
Du point de vue contentieux, le Conseil constitutionnel est juge de la régularité des opérations de référendum. Il faut aussi noter que le juge constitutionnel s’estime incompétent pour controler la loi référendaire au motif qu’elle constitue l’expression directe de la souveraineté nationale.
D – La désignation des gouvernants
1 – Le droit de suffrage
Il faut ici commencer par dsitinguer suffrage universel et suffarge restreint. Dans cet dernier cas, le droit de vote n’est accordé qu’à certains citoyens, la plupart du temps sur la base de leur fortune, on parle, alors de suffrage censitaire. Le suffrage universel suppose, lui, que le droit de vote soit accordé à l’ensemble des citoyens remplissant certaines conditions de base (age, nationalité, …). Ce type de suffrage est relativement récent. Il n’a, ainsi, été instauré en France qu’en 1848 pour les hommes; pour les femmes, il a fallu attendre 1944.
L’autre distinction concerne le suffrage direct et le suffrage indirect. Dans le premier cas, les électeurs élisent directement leurs représentants, comme pour les députés en France par exemple. Dans la seconde hypothèse, les électeurs élisent un collége électoral qui désigne ensuite les représentants. Ces intermédiaires peuvent etre spécialement élus pour l’occasion, comme les grands électeurs qui désignent le Président des Etats-Unis, ou procéder d’une autre élection, comme les sénateurs en France.
Il faut terminer par quelques observations. Ainsi, la plupart du temps, chaque citoyen ne possède qu’un voix, mais il peut arriver que le nombre de voix des citoyens dépendent par exemple du nombre d’enfants composant la famille. Par ailleurs, le vote est, la plupart du temps, facultatif, mais dans certains pays, comme la Belgique, il est obligatoire.
2 – L’organisation du scrutin
L’organisation du scrutin obéit à certaines conditions. Les premières concernent le droit de se porter candidat. Ainsi, si les candidatures sont libres en France, certaines limites sont posées. Il faut tout d’abord remplir certaines conditions d’éligibilté relative à l’age, à la nationalité, à la jouissance des droits civiques. Par ailleurs, certains mandats sont incompatibles avec l’exercice de certaines activités : ainsi, un parlementaire ne peut etre administrateur d’une entreprise subventionnée par l’Etat. Ces règles ont pour but d’éviter les conflits d’intérets.
De plus certaines considérations peuvent influer sur le scrutin. Il en va ainsi du découpage des circonscriptions électorales. En effet, une majorité au pouvoir peut décider de redécouper les circonscriptions selon qu’elle est ou non avantagée. Par exemple, en cas de déplacement de la population qui entraine statistiquement une baisse du nombre de ses électeurs supposés, la majorité peut décider de redécouper les circonscriptions pour rétablir son avantage.
De meme, une ingalité s’agissant des dépenses électorales peut modifier l’orientation des votes. C’est pourquoi la plupart des pays prévoient un plafonds de dépenses, ainsi en va-t-il en France depuis la loi du 15 Janvier 1990.
S’agissant du déroulement de la compagne proprement dite, les candidats doivent avoir accès aux médias, ce qui est controlé en France par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Par ailleurs, les pouvoirs publics doivent s’abstenir d’utiliser leurs prérogatives au profit d’un candidat ou d’un groupement.
S’agissant du vote, celui-ci doit etre secret afin d’éviter toute tentative de pression ou d’intimidation.
Enfin, une fois fait, les opérations électorales peuvent donner lieu à un contentieux. Le controle de la régularité des opérations peut etre confié à l’assemblée nouvellement élue, comme en France sous la III° et la IV° République. Mais, le risque est que celle-ci utilise ses pouvoirs pour invalider l’élection de ses adversaires. Ou, procédé plus démocratique, le contentieux électoral peut etre confié à des juridictions : des juridictions ordinaires comme pour les élections régionales, cantonale ou municipales, ou une juridiction spéciale comme le Conseil constitutionnel pour les élections des parlementaires.
II – Les modes de scrutin
Le choix du mode de scrutin est important dans la mesure ou il détermine significativement le résultat des élections. Ainsi, pour simplifier, le scrutin majoritaire fait apparaitre des majorités stables, tandis que la représentation proportionnelle permet la représentation de tous les groupes politiques.
Il faut, au préalable, opérer certaines distinctions. Ainsi, le système majoriatire correspond à la situation ou le ou les sièges sont attribués au candidat ou à la liste arrivée en tete. En revanche, la représentation proportionnelle correspond à la situation ou les sièges sont répartis entre les listes en fonction des voix obtenues.
Ensuite, le scrutin uninominal permet de désigner un seul candidat, alors que le scrutin de liste permet d’en désigner plusieurs.
Enfin, le scrutin peut etre à un ou deux tours.
A – Les scrutins majoritaires
Ces scrutins sont la plupart du temps uninominal, et plus rarement de liste.
1 – Le scrutin uninominal à un tour
C’est le système pratiqué en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis. Est déclaré élu le candidat qui qui a obtenu le plus de voix. L’avantage d’un tel mode de scrutin est de faire apparaitre très facilement une majorité. Ce système est étroitement lié au bipartisme : il favorise les grands partis en imposant aux électeurs de voter utile automatiquement. De plus, lorsque l’on passe du nombre de voix au nombre sièges, ce type de scrutin a pour conséquence de sur-représenter la formation majoritaire et de sous-représenter les partis minoritaires.
2 – Le scrutin uninominal à deux tours
C’est le système retenu en France pour l’élection des députés. Au premier tour pour etre élu, il faut avoir obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés. Si aucun des candidats ne dépasse ce seuil, il faut procéder à un second tour ou ne peuvent se présenter que les candidats ayant obtenu au moins 12,5 % du nombre des électeurs inscrits. Le candidat élu est celui qui obtient la majorité simple.
Ce système permet aux électeurs de faire valoir leurs préférences politiques au premier tour, puis de porter leur choix au second tour sur le candidat le moins éloigné de leurs opinions. Il est d’ailleurs influencé entre les deux tours par les alliances et consignes de vote des partis, ce qui se traduit le plus souvent par des désistements au profit d’un candidat.
Ce système a permis, depuis 1958, l’apparition de majorités stables, mais il ne permet pas la représentation des minorités d’une façon adaptée au nombre de suffrages recueillis par ces dernières.
B – La représentation proportionnelle
Il s’agit ici de répartir les sièges en fonction du nombre de voix obtenu par chaque liste. Ce système a l’avantage de permettre la représentation des petits partis. Mais, la multiplicité des partis nuit à l’efficacité de l’action publique. En effet, aucune orientation poltique claire ne se dégage, ce qui rend d’ailleurs l’alternance difficile. Par ailleurs, l’émergence d’une majorité stable est difficile à réaliser. De plus, le pouvoir des partis est renforcé dans la mesure ou ce sont eux qui déterminent qui sera élu, en établissant l’ordre des candidats sur la liste en fonction des résultats des scrutins précédents. Dans le meme sens, l’élu est sous la dépendance étoite de son part du fait de la discipline de vote qui lui est imposée.
Concrètement, la représentation proportionnelle suppose la répartition des sièges en fonction des voix obtenues par les différentes listes. Cette opération commence par la détermination du quotient électoral : celui-ci est obtenu en divisant le nombre de suffrages exprimés par le nombre de sièges attribués à la circonscription. Les sièges sont ensuite répartis entre les listes en divisant le nombre de suffrages obtenus par chaque liste par le quotient électoral. Mais, meme après cette opération, il reste des sièges à pourvoir. Plusieurs méthodes peuvent etre, alors, utilisées :
– la représentation proportionnelle approchée suppose une répratition des restes à l’intérieur de la circonscription et non sur le plan national. Deux systèmes sont possibles : celui des plus forts restes et celui de la plus forte moyenne.
– la représentation proportionnelle intégrale suppose une répartition des restes sur la plan national. Deux systèmes sont possibles : le premier fait du territoire national une seule circonscription ou son répartis tous les sièges. Le second système consiste à additionner les voix non représentées de chaque liste et les sièges sont, alors, répartis en fonction d’un quotient électoral établi au niveau national.
C – Les systèmes mixtes
Certains systèmes essaient de combiner les avantages du système majoritaire et de la représentation proportionnellle. C’est le cas de la désignation du Bundestag en Allemagne, ou du système français des apparentements sous la IV° République.