Le député maire de Mindif est de ces militants pour lesquels
le Rassemblement démocratique du peuple camerounais peut
se bomber le torse. Et pour cause: au plus fort des années de
braise, alors que le principal parti au pouvoir semblait prendre
l’eau de toute part, ballotté par les vents de la contestation et du
multipartisme, certains ont cru bon de quitter la barque avant un
naufrage annoncé. D’autres ont choisi une espèce d’exil intérieur
en rasant les murs. D’autres par contre, comme Haman Tchiouto
ont décidé de lutter avec l’énergie du désespoir pour remettre le
navire à flots. Dans une météo politique viciée par l’Undp de
Maïgari Bello Bouba, le Mdr de Dakolé Daïssala et le Pnp de
Antar Gassagay.
Quelques consultations électorales plus tard, le Rdpc tient
seul la barque Extrême-Nord. Les démissionnaires d’hier reviennent
en masse. Haman Tchiouto a-t-il dès lors raison de dire «
qu’il a combattu le bon combat ? ». En fait ce quadragenaire n’est
à l’aise que dans l’adversité. Ainsi formaté par les aspérités d’un
destin qui a mis du temps à lui sourire.
Venu au monde dans une famille pauvre, le petit Haman a
assimilé très tôt que rien n’irait de soi pour lui. Il a donc dû ferrailler
dur pour s’instruire et s’ouvrir plus tard les portes de la célèbre
Ecole des infirmiers d’Ayos. Son intégration à la Fonction publique
va rendre son quotidien plus facile en même temps que le mépris
qui l’entourait va se muer en respect.
Tout cela va crescendo lorsqu’il s’inscrit à ce qui s’appelait
CUSS de Yaoundé pour une spécialisation d’infirmier accoucheur.
Son savoir et sa science, il veut les mettre au service des siens. Il
jubile donc lorsqu’il est affecté à l’hôpital provincial de Maroua.
Son séjour sera néanmoins de courte durée. Car un jour de l’année 1983, Haman Tchiouto va entamer sa troisième vie, celle de politique, après sa vie de misère et celle d’homme en blouse blanche. Il est nommé maire de Mindif. Il sera ensuite élu, et re-réélu quand vient l’heure de la pluralité des candidatures au sein du parti au pouvoir en 1987 puis, lorsqu’ arrive le multipartisi intégral en 1990. Le maire s’adjuge aussi au passage et avec la même régularité les mandats de député et de président de section. Vous lirez donc sur sa carte de visite: député-maire de Mindif, président de la section Rdpc en attendant qu’il y ajoute sa dernière casquette en date : coordonnateur provincial de la carte nationd d’identité informatisée sur décision du délégué général à la surete nationale. Cette autre promotion a donné du grain à moudre aux adversaires de l’élu du peuple. Pour ces derniers, il n’est qu’un redoutable féticheur. La preuve la plus voyante serait son bonnet rouge presque toujours vissé sur la tête. Les défenseurs de cette thèse qui relève de la métaphysique colportent cette histoire : un notable de Mindif brouillé avec l’honorable aurait décidé de l’expédier dans l’au-delà avec une arme à feu. En faisant irruption dans le salon de sa cible, il trouve assis côte à côte 10 clones d’Haman Tchiouto. Impossible de tirer. C’est de la simple affabulation soutient le « vrai » entre deux éclats de rire. Pour lui, il n’y a pas d’autre magie dans la vie que le triptyque croyance, endurance, chance.
Bienvenue a l’extrême-Nord
Radioscopie d’une province et de ses personnalités incontournables
Aimé Robert BIHINA
Eric Benjamin LAMERE