SECTION II : LES SOURCES DU DROIT DE L’URBANISME
1. Réglementations nationales
• Les lois
— Elles jouent un rôle essentiel. L’article 34 de la constitution attribue au
législateur la détermination des principes fondamentaux touchant au droit de
propriété.
— Les meilleures, aux effets les plus durables, sont celles qui se donnent pour
objet la mise au point de grands systèmes d’orientation. En font partie la loi
d’orientation foncière du 30 décembre 1967 (aménageant les P.O.S. et les
S.D.A.U.), la loi foncière du 31 décembre 1975 (créant le P.L.D. et les Z.I.F.), la
loi portant réforme de l’urbanisme du 31 décembre 1976 (réaménageant les P.O.S.
et le permis de construire), les lois des 7 janvier et 22 juillet 1983 sur la
répartition des compétences entre l’Etat et les collectivités locales ainsi que la loi
du 18 juillet 1985 sur les principes de l’aménagement.
— Il est logique que des problèmes d’envergure nationale ne soient pas traités par
des textes de rang inférieur : la loi montagne, du 9 janvier 1985, la loi sur le
voisinage aux abords des aérodromes du 11 juillet 1985 et la loi littoral du
3 janvier 1986 ont très opportunément pris le relais d’anciennes directives
d’aménagement. Décriées par certains comme trop imprécises, les lois littoral et
montagne ont le mérite d’avoir posé de grandes orientations mobilisatrices,
destinées à être complétées par des décrets d’application qui, pour certains, tardent
à intervenir.
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Droit de l’urbanisme
• Les règlements à portée nationale
On en donnera comme exemple les règles générales d’urbanisme prévues par
divers décrets, en particulier celui du 30 novembre 1961 portant règlement
national d’urbanisme (R.N.U.).
• Les circulaires et les réponses ministérielles
— Elles n’ont pas de valeur juridique en principe, sauf pour les circulaires
présentant un caractère réglementaire : cf. jurisprudence N.D. du Kreisker, CE.
29 janvier 1954.
— Traduisant la doctrine de l’administration, expliquant des textes souvent
amphigouriques, elles ont une grande importance pratique. La place prise par ces
sources méta-juridiques, et la déviance parfois, dans la hiérarchie des normes ont
souvent été dénoncées : la « doctrine administrative » ne peut donner que ce
qu’elle a.
2. La jurisprudence
— Le droit de l’urbanisme, au sens large, incluant le droit de l’expropriation, a
fourni au juge administratif l’occasion de grandes créations prétoriennes,
concernant en particulier le contrôle du pouvoir discrétionnaire : théories de
l’erreur manifeste (CE. 29 mars 1968, «Soc. lotissement plage de
Pampelonne »), et du « bilan » (CE. 28 mai 1971, « Ville Nouvelle Est »),
appliqué aux dérogations : (CE. 5 juillet 1973, « Ville de Limoges »).
— Il lui a offert l’opportunité de constructions jurisprudentielles
sophistiquées : retrait des décisions implicites d’octroi, notion de publicité
complète, intérêt à agir, détournement de pouvoir, lien entre les autorisations
individuelles et les normes réglementaires…
— Quelque peu essoufflée dans les années 80, cette jurisprudence a retrouvé une
vigueur et un intérêt nouveau avec les réformes issues de la décentralisation :
contentieux de la légalité des P.O.S., des Z.A.C., contentieux de la
responsabilité…
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Introduction
— Le caractère flexible, d’aucuns diront incertain, de nombreuses règles : rapport
de « comptabilité », « prise en compte » ou en « considération » conviennent à la
jurisprudence traditionnellement prudente et nuancée du juge administratif qui
n’hésite pas cependant quand l’administration dépasse la mesure à en faire une
application rigoureuse.
— Cet impressionnisme sied mal au contraire au juge pénal qui, avec le juge civil,
intervient aussi pour faire appliquer le droit de l’urbanisme.
3. Réglementations locales
Entre 1943 et 1983, l’urbanisme fut une affaire d’Etat. Les représentants de
l’Etat : préfet et D.D.E. avaient la responsabilité principale des documents
d’urbanisme et des autorisations de construire délivrées « au nom de l’Etat ».
La situation s’est inversée en 1983. Les communes sont devenues responsables de
l’élaboration de leur P.O.S. et les autorisations de construire, lorsque la commune
s’est dotée d’un P.O.S., sont délivrées en son nom.
Les sources locales sont plus précises que les règles nationales mais sont, en
général, perçues comme plus malléables. Le déféré préfectoral peut être un
moyen sûr de contrôler leur légalité mais son usage demeure beaucoup trop
limité : trois par an et par département en moyenne dans le domaine de
l’urbanisme (cf. Rapport Labetoulle précité).
SECTION III : L’ENCADREMENT INSTITUTIONNEL
Un nouveau partage du pouvoir, une redistribution des rôles sont intervenus
qu’exprime, en des termes lyriques non dépourvus d’élégance, l’article L. 110,
réécrit en 1983, qui ouvre le Code de l’urbanisme. L’article 5 de la loi du 13 juillet
1991 l’a « surchargé » inutilement.
« Le territoire français est le patrimoine commun de la nation. Chaque
collectivité publique en est le gestionnaire et le garant dans le cadre de ses
compétences. Afin d’aménager le cadre de vie, d’assurer sans discrimination aux
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Droit de l’urbanisme
populations résidentes et futures des conditions d’habitat, d’emploi, de services et
de transports répondant à la diversité de leurs besoins et de leurs ressources, de
gérer le sol de façon économe, d’assurer la protection des milieux naturels et des
paysages ainsi que la sécurité et la salubrité publique et de promouvoir
l’équilibre entre les populations résidant dans les zones urbaines et rurales, les
collectivités harmonisent, dans le respect réciproque de leur autonomie, leurs
prévisions et leurs décisions d’utilisation de l’espace ».
Complémentarité, solidarité, équilibre, harmonie devraient inspirer les
relations entre les diverses administrations, les organismes aménageurs et les
associations qui constituent l’armature institutionnelle de l’urbanisme.
1. Les administrations d’Etat
• Le Ministère de tutelle
— « Affaire d’Etat », l’urbanisme se voit enfin doté par la loi du 15 juin 1943 de
services propres. Auparavant le Ministère de l’Intérieur avait ce domaine en
charge. A l’origine, il n’y a pas de Ministère à part entière mais seulement une
Délégation à l’équipement national avec une direction de l’urbanisme. Les
services extérieurs, sous l’autorité d’un Inspecteur général, sont aménagés au
niveau régional.
— Le premier ministère spécifique, celui de la Reconstruction et de l’Urbanisme
apparaît en 1944. Il est qualifié Ministère de la Construction en 1959 et devient le
Ministère de l’Équipement, en 1966, lorsque les Travaux publics lui sont adjoints.
— Entre 1978 et 1981, la brève expérience d’un super Ministère regroupant
l’Équipement et l’Environnement prouve combien il est illusoire de vouloir
concilier les « protecteurs et les aménageurs » en regroupant les structures, ce qui
prive le plus fragile de ses pouvoirs d’opposition à l’égard du puissant rival sans
encourager vraiment la coopération.
— Depuis, un Ministère de l’Équipement et du Logement (terme préféré à celui de
Construction) a en charge l’Urbanisme, auquel sont adjoints parfois d’autres
domaines d’intervention, cf. Transports.
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Introduction
— De nombreux Ministères sont concernés par les questions d’urbanisme :
Environnement, Culture, Agriculture, Commerce et Industrie.
— En 1991, un Ministère de la ville, devenu peu après secrétariat d’Etat, puis
rattaché à un autre Ministère, a été mis en place chargé d’animer et coordonner
l’action du gouvernement pour la préparation et la mise en oeuvre d’une « politique
nationale de la ville et du développement social urbain ». Son existence et sa
place au sein du gouvernement varient depuis.
• Les directions centrales
— Celle qui a le plus directement en charge les problèmes d’urbanisme est la
Direction de l’aménagement et de l’urbanisme (D.A.U.). Elle résulte de la fusion
en 1985 de la Direction de l’urbanisme et des paysages et de celle de
l’Architecture. Réorganisée en 1987, elle accueille désormais une sous-direction
horizontale chargée de l’assistance juridique et du contentieux.
— Une autre direction intervient fréquemment, celle de la Construction, chargée
de la politique du logement et de l’habitat.
— En 1989, ces services se sont installés à l’Arche de la Défense.
• Les structures de coordination
— Certaines sont anciennes et concernent plus largement l’aménagement du
territoire : Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale
(D.A.T.A.R.), Comité interministériel pour les problèmes d’aménagement du
territoire et d’action régionale (C.I.A.T.).
— D’autres, récentes, issues d’un décret du 28 octobre 1988, visent à regrouper
autour du Premier ministre, qui préside ces organismes nouveaux, un dispositif
missionnaire opérationnel prenant en compte non seulement l’aspect économique
mais la dimension sociale du phénomène urbain. Un Conseil national des villes et
du développement social urbain, un Conseil interministériel et une Délégation
interministérielle composent ce dispositif. Ils suivent la préparation et l’exécution
des « contrats de ville », prévus en 1992 et destinés à devenir l’unique cadre
contractuel de la politique de la ville du IXe Plan (1994-1998).
Enfin, certains organismes ont une vocation plus spécifique et technique et
jouent un rôle consultatif important : Conseil national des Ponts et Chaussées,
Commission nationale d’urbanisme commercial, Commission nationale des
secteurs sauvegardés, Groupe central des villes nouvelles, Délégation à la
rénovation des banlieues…
• Les services déconcentrés de l’Etat
On les rencontre à l’échelon régional et départemental :
— Les structures régionales sont légères. Les Directions régionales de
l’Équipement (D.R.E.) ont des tâches de réflexion et programmation.
Deux autres directions spécialisées peuvent être amenées à intervenir : celle des
Affaires culturelles (DR.A.C.), celle de Y Environnement (D.I.R.E.N.). Les
premières ont en charge les monuments historiques, les secondes les sites et
depuis la réforme du décret du 4 novembre 1991 des missions élargies dans le
cadre de plans municipaux et départementaux de l’environnement.
— Les Directions départementales de l’Équipement (D.D.E.) sont au contraire
dotées de moyens puissants à la mesure de leurs compétences étendues :
urbanisme, logement, mais aussi grands travaux d’infrastructure, constructions
publiques, transports. On distingue généralement un groupe d’étude et de
programmation (G.E.P.) chargé de l’étude des documents d’urbanisme et un
groupe d’urbanisme opérationnel et construction, responsable des autorisations
d’occupation du sol. Des antennes déconcentrées se rencontrent au niveau de
l’arrondissement et dans un cadre pluricantonnal.
— Les D.D.E. conservent leur mission traditionnelle d’aide technique rémunérée
à la gestion communale.
— Dans les lois de décentralisation un autre mode de collaboration a été prévu. Il
s’agit de la mise à disposition gratuite de leurs services et de leur savoir-faire au
profit des collectivités locales qui en feront la demande à la fois pour l’élaboration
des documents d’urbanisme (art. L 121-2) et pour l’instruction des demandes
d’autorisation d’utilisation du sol (art. L 421-2-6). Des conventions de mise à
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Introduction
disposition passées entre le préfet et le maire officialisent cette collaboration. Les
textes sont muets et la jurisprudence encore incertaine sur les partages de
responsabilité dont la charge principale incombera vraisemblablement aux
collectivités locales et non aux services de l’Etat, lesquels interviennent
gratuitement et à la demande des autorités décentralisées.
— La jurisprudence précise peu à peu comment doit s’opérer le partage de
responsabilité entre les communes et les services de l’Etat. Bien que ces derniers
interviennent gratuitement et à la demande des autorités décentralisées, ils ne
peuvent être déchargés de toute responsabilité s’ils commettent des erreurs dans
les avis qu’ils délivrent.
Une faute simple devrait suffire, la mission de conseil n’étant pas particulièrement
délicate à exercer (cf. C.A.A. Bordeaux, 8 avril 1993 ; responsabilité partagée par
moitié entre l’Etat qui n’a pas délimité une zone de risque et la commune qui a
délivré dans ce secteur à risque un permis de construire).
2. Les administrations locales décentralisées
• Les structures régionales et départementales
— S’ils possèdent peu de compétences décisionnelles propres, les départements et
les régions peuvent d’une part allouer des aides financières aux communes pour
leurs acquisitions foncières et leurs opérations d’aménagement, d’autre part
demander à être associés à l’élaboration des S.D. et des P.O.S., les régions étant
obligatoirement consultées sur la mise en place des S.D. dans les agglomérations
de plus de 100 000 habitants, ainsi que sur le contenu des schémas de mise en
valeur de la mer.
— Par ailleurs, les départements disposent d’importants pouvoirs d’intervention
foncière s’ils décident de la délimitation d’espaces naturels sensibles, zones à
l’intérieur desquelles ils bénéficieront du droit de préemption et de ressources
fiscales propres (taxe départementale des espaces naturels sensibles) pour
financer les acquisitions.
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Droit de l’urbanisme
— La loi du 3 janvier 1977 a institué des Conseils départementaux d’architecture,
d’urbanisme et d’environnement (C.A.U.E.) ayant pour mission de promouvoir la
qualité de l’architecture, d’informer et conseiller gratuitement les particuliers et les
collectivités locales quant à la qualité urbanistique et architecturale. Le caractère,
dans certains cas, obligatoire de cette consultation a été supprimé.
• Les structures communales
— Dépositaires depuis 1983-1985 de très larges pouvoirs leur permettant de
maîtriser la planification de leur sol, la délivrance des autorisations de construire,
les opérations d’aménagement et les interventions foncières par l’usage du droit de
préemption, les communes d’une certaine importance se sont dotées de services
spécialisés qui, sous l’autorité d’un ingénieur, regroupent généralement un service
de l’action foncière, un service des opérations d’urbanisme et un service des
permis de construire.
— Certaines agglomérations ont une Agence d’urbanisme, organisme parapublic
à caractère mixte rassemblant des représentants des communes (en
majorité) et des représentants de l’Etat. Ces agences réalisent des études
préalables à l’élaboration des documents d’urbanisme et à la réalisation des
opérations d’aménagement. Une trentaine sont en activité.
— L’émiettement communal appelle des structures de regroupement. La mise en
place des communautés de ville et des communautés de commune, prévues par la
loi du 6février 1992 sur l’administration territoriale de la République devrait
faciliter l’intercommunalité.
* Les structures intercommunales de coopération
— Cette coopération peut intervenir dans le cadre de structures traditionnelles :
S.I.V.O.M., districts, communautés urbaines, regroupés sous la dénomination
générique d’établissements publics de coopération intercommunale : E.P.C.I.
— Elle peut faire appel à une structure, créée en 1983, nouvelle catégorie
d’E.P.C.I. : le syndicat intercommunal d’études et de programmation,
– 2 0 –
Introduction
organisme temporaire plus spécialisé qui a compétence pour élaborer ou modifier
les S.D.
— Elle aide à la résolution des conflits pouvant survenir lors de l’élaboration d’un
S.D. ou d’un P.O.S. La loi du 7 janvier 1983 a prévu dans chaque département
une Commission de conciliation en matière d’urbanisme, composée de 6 élus
communaux et de 6 personnalités qualifiées. Sur saisine des autorités publiques
« associées » à l’élaboration des documents d’urbanisme qui auraient émis un avis
défavorable au projet, ces commissions ont pour mission la recherche d’un accord,
médiation amiable qui exclut un pouvoir de décision. Les cas de saisine
demeurent rares.
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