Loi n° 2003/003 du 21 avril 2003 portant protection phytosanitaire
L’Assemblée nationale a délibéré et adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
CHAPITRE I
DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Article 1er : La présente loi fixe les principes et les règles régissant la protection phytosanitaire au Cameroun.
Article 2 : La protection phytosanitaire se fait à travers :
– l’élaboration, l’adoption et I’adaptation des normes en la matière ;
– la prévention et la lutte contre les ennemis des végétaux et des produits végétaux ;
– l’utilisation des produits phytosanitaires sans danger pour la santé humaine, animale et pour l’environnement ;
– la diffusion et la vulgarisation des techniques appropriées à la protection phytosanitaire ;
– le contrôle de l’importation et de l’exportation des produits phytosanitaires, des végétaux, produits végétaux et autres articles réglementés pouvant entraîner la dissémination des ennemis des végétaux ;
– le contrôle, sur le territoire national, des produits phytosanitaires, des végétaux et des produits végétaux pouvant servir de vecteurs aux organismes nuisibles.
Article 3 : Au sens de la présente loi et des textes pris pour son application, les définitions suivantes sont admises :
– « activité phytosanitaire » : toute opération relative à la production, la distribution et l’utilisation des végétaux, produits végétaux et des produits phytosanitaires en champ, en stock et au traitement des locaux de stockage et des moyens de transport ;
– « articles réglementés » : tout végétal, produit végétal, lieu de stockage, emballage, moyen de transport, container, sol, tout autre organisme, objet ou matériel susceptible de porter ou de disséminer des organismes nuisibles justifiant des mesures phytosanitaires particulièrement pour tout ce qui concerne les transports internationaux ;
– « auxiliaire » : organisme nuisible qui vit aux dépens d’un autre et qui peut contribuer à limiter la population de son hôte, incluant les parasitoïdes. les parasites, les prédateurs et les agents pathogènes ;
– « certificat phytosanitaire » : document officiel conforme au modèle établi par la convention internationale pour la protection des végétaux, attestant de l’état sanitaire d’un envoi soumis au contrôle phytosanitaire ;
– » certificat de conformité à la norme » : document officiel délivré par l’organe national de normalisation et attestant que le produit au service évalué est conforme à la norme ;
– « homologation » : tout processus au terme duquel l’autorité compétente approuve l’importation, la distribution et l’utilisation d’un produit phytosanitaire, après examen des données scientifiques complètes montrant que le produit est efficace pour les usages prévus et ne présente pas de risques pour la santé humaine, animale et pour l’environnement dans les conditions d’emploi recommandées ;
– « inspection » : examen visuel officiel de végétaux, de produits végétaux et autres articles réglementés afin de déterminer la présence ou l’absence d’organisme nuisibles et/ou de s’assurer du respect de la réglementation phytosanitaire ;
– « organisme de quarantaine » : organisme nuisible qui a une importance potentielle pour l’économie de la zone menacée et qui n’est pas encore présent dans cette zone ou bien qui y est présent mais n’y est pas largement disséminé et fait l’objet d’une lutte officielle ;
– « organisme nuisible » : toute espèce, souche ou biotype de végétal ou d’animal, ainsi que d’animal, ainsi que d’agent pathogène, nuisible aux végétaux et produits végétaux ;
– « pesticide » : toute substance ou association de substances destinées à repousser, détruire au combattre les ravageurs, les vecteurs de maladies et les espèces indésirables de plantes ou d’animaux causant des dommages ou se montrant autrement nuisibles durant la production, la transformation, le stockage, le transport ou la commercialisation des produits alimentaires, des produits agricoles, du bois et des produits forestiers non ligneux ;
– « produits phytosanitaires » : pesticides et autres substances destinées à être utilisées comme régulateurs de croissance des plantes, comme défoliants, agents de dessiccation, d’éclaircissage des fruits, ou pour empêcher la chute prématurée des fruits, ainsi que les substances appliquées sur les cultures, soit avant, soit après la récolte pour protéger les produits contre la détérioration durant l’entreposage et le transport ;
– « produits végétaux » : tout produit d’origine végétale, y compris le pollen et les produits manufacturés qui, en raison de leur nature ou de leur transformation, peuvent constituer un risque d’introduction ou de dissémination des organismes nuisibles ;
– « quarantaine végétale » : ensemble des activités qui visent à prévenir l’introduction et/ou la dissémination d’organismes nuisibles ou à les combattre officiellement ;
– « zone de quarantaine » : zone délimitée à l’intérieur de laquelle un organisme de quarantaine est présent et fait l’objet d’une lutte officielle .
Article 4 : L’activité phytosanitaire s’exerce librement sur l’étendue du territoire national, par toute personne physique ou morale, dans le respect des lois et règlements en vigueur.
Article 5 : L’autorité compétente en matière de protection phytosanitaire est le ministre chargé de l’Agriculture. Il peut en déléguer l’exercice à toute personne physique ou morale suivant les modalités fixées par voie réglementaire.
Article 6 : Le ministre chargé de l’agriculture peut requérir l’appui des services relevant d’autres administrations dans le cadre de l’application de la législation phytosanitaire.
CHAPRITRE II
DE LA PROTECTION PHYTOSANITAIRE DU TERRITOIRE
SECTION I
DES NORMES APPLICABLES EN MATIERE PHYTOSANITAIRE
Article 7 : Les normes applicables au Cameroun dans le domaine phytosanitaire sont élaborées et mises en vigueur conformément à la législation nationale et aux instruments internationaux en la matière.
SECTION II
DE LA QUARANTAINE VEGETALE
Article 8 :
(1) Il est interdit d’introduire, de détenir, de transporter sur le territoire national, des organismes de quarantaine, quel que soit leur stade de développement.
(2) La liste des organismes de quarantaine est publiée par arrêté du ministre chargé de l’agriculture et est régulièrement mise à jour.
(3) Toutefois, des dérogations peuvent être accordées pour des besoins de recherche, d’expérimentation ou de formation.
Article 9 :
(1) L’importation ou l’exportation des végétaux ou produits végétaux, sols et milieux de culture contaminés par des organismes nuisibles est prohibée.
A l’importation ou à l’exportation, les végétaux, produits végétaux, sols ou milieux de culture doivent être accompagnés d’un certificat phytosanitaire.
(2) En outre, l’importation des végétaux, produits végétaux réglementés ou d’agents de lutte biologique, est conditionnée par l’obtention d’un permis d’importation dont les conditions de délivrance sont fixées par voie réglementaire.
Article 10 :
(1) L’importation ou l’exportation de végétaux et produits végétaux doit être effectuée uniquement aux points d’entrée ou de sortie officiels.
(2) L’importation des végétaux et produits végétaux assujettis au permis d’importation et en particulier l’importation du matériel végétal destiné à la plantation ou à la multiplication, doivent se faire uniquement au point d’entrée mentionné sur le permis d’importation. Ces produits et matériels peuvent être soumis à un contrôle préalable dans une station de quarantaine d’un pays intermédiaire ou dans le pays d’origine.
Article 11 : Le certificat phytosanitaire et le permis d’importation visés à l’article 9 ci-dessus sont délivrés, aux frais du demandeur, par les épices chargés de la police phytosanitaire.
Article 12 : Le ministre chargé de l’agriculture fixe, en tant que de besoin, la liste des végétaux, parties de végétaux et produits végétaux dont l’importation est prohibée ou restreinte au Cameroun selon leur provenance.
Article 13 : En cas d’introduction, de présomption d’introduction ou de propagation d’un organisme nuisible non classé de quarantaine, l’autorité compétente doit prendre les mesures phytosanitaires complémentaires jugées nécessaires.
Article 14 :
(1) En cas de présence ou de présomption de présence d’un organisme de quarantaine dans une partie du territoire, celle-ci peut être déclarée zone de quarantaine par voie réglementaire jusqu’au contrôle ou à l’éradication dudit organisme.
(2) Durant la période concernée, tout mouvement de végétaux, de produits végétaux ou de sols hors de ladite partie est interdit.
SECTION III
DE LA SURVEILLANCE PHYTOSANITAIRE
Article 15 : Toute personne physique ou morale qui, sur un fonds lui appartenant ou exploité par elle, ou sur des produits végétaux ou articles qu’elle détient en magasin, constate ou suspecte la présence d’un organisme de quarantaine ou tout autre organisme nuisible, est tenue de la déclarer à l’autorité phytosanitaire compétente de son ressort.
Article 16 : Toute personne physique ou morale, publique ou privée exploitant un fonds rural ou urbain, a l’obligation de veiller au bon état sanitaire des végétaux et des produits qu’elle cultive, conserve, transporte ou commercialise.
Article 17 :
(1) Le ministre chargé de l’agriculture met en plus un réseau de surveillance de l’apparition des organismes nuisibles, de l’évolution des populations et de la prévision des attaques.
(2) Il publie et met régulièrement à jour la liste des organismes nuisibles.
Article 18 : Certaines parties du territoire peuvent être classées comme zones menacées ou comme zones indemnes par voie réglementaire.
SECTION IV
DE LA LUTTE PHYTOSANITAIRE
Article 19 :
(1) Les traitements chimiques doivent être exécutés en respect des bonnes pratiques agricoles édictées par l’autorité compétente, afin de préserver la santé humaine et animale et de protéger l’environnement des dangers provenant de la présence ou de l’accumulation de résidus de produits phytosanitaires.
(2) Les méthodes de traitement des denrées stockées doivent garantir l’absence ou la présence à des teneurs tolérées, des résidus des produits phytosanitaires, et préserver les qualités organoleptiques des produits traités.
Article 20 :
(1) Toute personne physique ou morale désirant exécuter des traitements phytosanitaires à titre professionnel, doit être préalablement agréée par l’autorité compétente.
(2) Les conditions d’agrément à l’exercice des traitements phytosanitaires sont fixées par voie réglementaire.
CHAPRITE III
DE L’UTILISATION, DE L’INSPECTION ET DU CONTRÔLE DES PRODUITS PHYTOSANITAIRES
SECTION I
DE L’UTILISATION DES PRODUITS PHYTOSANITAIRES
Article 21 :
(1) Seuls les produits phytosanitaires homologués ou bénéficiant d’une autorisation provisoire de vente doivent être importés, distribués, conditionnés ou utilisés au Cameroun.
(2) Les modalités d’application de l’alinéa 1 ci-dessus sont fixées par voie réglementaire.
Article 22 :
(1) Les produits phytosanitaires sont commercialisés et utilisés dans leur emballage et étiquetage d’origine.
(2) Les normes d’emballage et d’étiquetage ainsi que Ies conditions de formulation et de conditionnement des produits phytosanitaires sont fixées par voie réglementaire.
Article 23 :
(1) L’utilisation des produits phytosanitaires à des fins autres que celles pour lesquelles ils ont été homoIogués et prohibés.
(2) Des mesures particulières peuvent être prises par voie réglementaire pour la protection des auxiliaires et des insectes pollinisateurs.
Article 24 :
(1) La vente des produits phytosanitaires en vrac ou à l’étalage est interdite. Il en est de même de la détention des produits phytosanitaires obsolètes.
(2) Les produits phytosanitaires obsolètes doivent faire l’objet d’une déclaration auprès de l’autorité chargée des questions phytosanitaires, dès le premier jour suivant la date de péremption.
Article 25 :
(1) Toute personne physique ou morale désirant exercer une activité professionnelle portant sur Les produits phytosanitaires, notamment en matière de fabrication, d’importation, d’exportation, de formulation, de conditionnement et de distribution doit au préalable être agréée.
(2) Les conditions d’agrément visées à l’alinéa (1) ci-dessus sont fixées par voie réglementaire.
Article 26 : Toute publicité pour un produit phytosanitaire non autorisé est interdite. Pour les produits phytosanitaires autorisés, la publicité ne peut mentionner que les indications pour lesquelles ils sont autorisés.
Article 27 :
(1) Les appareils de traitement phytosanitaire fabriqués, importés et distribués au Cameroun doivent être certifiés pour leur conformité aux normes en vigueur.
(2) Les conditions de certification des appareils de traitement phytosanitaire sont fixées par voie réglementaire.
SECTION II
DE I’INSPECTION ET DU CONTROLE DES PRODUITS PHYTOSANITAIRES
Article 28 : Tous les végétaux, produits végétaux, sols ou milieu de culture, organismes de lutte biologique ainsi que les produits phytosanitaires sont assujettis :
– à l’inspection phytosanitaire quel que soit leur lieu de production, de multiplication et de stockage et leur mode de transport ;
– au contrôle lors de leur fabrication, de leur importation, de leur exportation, de leur conditionnement, de leur distribution et de leur utilisation.
Article 29 : L’inspection phytosanitaire et le contrôle des produits phytosanitaires s’effectuent selon les dispositions prévues par les normes nationales, le code de procédure d’inspection adopté par l’autorité phytosanitaire nationale, et le cas échéant, les directives internationales.
Article 30 : Toute personne physique ou morale détenant des végétaux, produits végétaux ou des produits phytosanitaires dans ses bagages est tenue d’en faire la déclaration aux agents chargés de l’inspection phytosanitaire et du contrôle des produits phytosanitaires aux points d’entrée et de sortie du territoire.
CHAPITRE IV
DE LA RÉPRESSION DES INFRACTIONS
SECTION I
DE LA PROCEDURE REPRESSIVE
Article 31 : Sans préjudice des prérogatives reconnues au ministère public et aux officiers de police judiciaire à compétence générale, les agents assermentés de l’inspection phytosanitaire sont chargés de la recherche, de la constatation et des poursuites en répression des infractions commises en matière phytosanitaire.
A ce titre, ils procèdent à la constatation des faits, à la saisie des végétaux, des produits végétaux ou des agents de lutte biologique introduits sans certificat ou permis d’importation, des produits phytosanitaires vendus en vrac ou sur l’étalage, ainsi que ceux introduits ou utilisés en violation des dispositions de la présente loi et en dressent procès-verbal.
Le procès-verbal rédigé et signé par l’agent assermenté fait foi des constatations qu’il relate jusqu’à inscription en faux.
Article 32 : Les agents assermentés chargés de l’inspection phytosanitaire et du contrôle des produits phytosanitaires peuvent, dans l’exercice de leurs fonctions et suivant les procédures prévues par la réglementation en vigueur :
– requérir la force publique pour la recherche et la saisie des produits végétaux et phytosanitaires introduits, vendus ou circulant frauduleusement ou pour obtenir l’identification du contrevenant ;
– visiter les locaux, trains, navires, véhicules ou aéronefs abritant, transportant ou susceptibles de transporter ou d’abriter lesdits produits ;
– ordonner les traitements, la mise en quarantaine, la destruction ou le refoulement des végétaux et produits végétaux ;
– apposer des scellés.
SECTION IL
DES INFRACTIONS ET DES SANCTIONS
Article 33 : Est puni d’une amende de cinquante mille (50 000) francs, toute personne auteur des infractions suivantes :
– défaut de présentation d’une efficacité phytosanitaire ;
– défaut de déclaration de végétaux, produits végétaux et produits phytosanitaires ;
– défaut de déclaration de produits phytosanitaires obsolètes.
Article 34 : Est puni d’un emprisonnement de un (1) à trois (3) mois et d’une amende de cent mille (100 000) à un million (1 000 000) de francs CFA ou de l’une de ces deux (2) peines seulement, quiconque introduit des végétaux réglementés ou des agents de lutte biologique sans pertuis d’importation.
Article 35 : Est puni d’un emprisonnement de un (1) à trois mois et d’une amende de cent mille (100 000) à un million (1 000 000) de francs CFA ou de l’une de ces deux peines seulement quiconque enfreint les dispositions des articles 20 à 26 de la présente loi.
Article 36 :
(1) Est puni des peines prévues à l’article 261 du code pénal, celui qui, par maladresse, négligence ou inobservation des règlements, occasionne la pollution avant, pendant ou après un traitement phytosanitaire.
(2) Est puni des peines prévues à l’article 289 (1) du code pénal, celui qui dans les circonstances décrites à l’alinéa 1er ci-dessus, cause à autrui une intoxication génératrice des incapacités.
CHAPITRE V
DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES
Article 37 :
(1) Il est institué un conseil national phytosanitaire, organe de consultation en matière de politique de protection des végétaux au Cameroun.
(2) La composition, les missions et les modalités de fonctionnement du conseil national phytosanitaire sont fixées par voie réglementaire.
Article 38 : Sont abrogées toutes les dispositions de la loi n° 90/013 du 1 0 août 1990 portant protection phytosanitaire.
Article 39 : La présente loi sera enregistrée, publiée suivant la procédure d’urgence, puis insérée au journal officiel en français et en anglais.
Yaoundé, le 21 avril 2003
Le Président de la République
(é) Paul Biya