Il dit lui-même de son parcours qu’il est bizarre. Peut être parce que ce natif du Logone Birni qui a aujourd’hui voix au chapitre dans les archives du Cameroun a bien failli ne jamais aller à l’école des Blancs. Du moins s’il ne tenait qu’à son marabout de père qui a freiné des quatre fers et n’a dû lâcher du lest que sous la menace du sultan.

Flash back. 1962. Ali Kirna qui a, dans l’intervalle décroché le diplôme de moniteur de l’enseignement général prend la route de Nkongsamba pour s’inscrire à l’Ecole normale de la bouillante capitale du Moungo. Mais le jeune étudiant n’y reste qu’une année, la peur au ventre à cause des bruits de botte de la rébellion qui écument la région. Le jeune instituteur-adjoint est affecté à Kousseri comme directeur de l’école franco-arabe. Ce poste en ces années-là aurait pu faire le bonheur de quelqu’un d’autre mais pas Ali Kirna. Sa soif inaltérable de connaissance et son ardent désir de quitter le bas de l’échelle sociale sont plus forts que tout. Le revoici donc sur la route. Direction ? Yaoundé où il accède à l’Ecole normale supérieure. Nous sommes en 1965.

Deux années académiques bien studieuses plus tard, il accède au grade d’inspecteur de l’enseignement primaire. C’est à ce titre qu’il est dépêché dans le Haut-Nyong puis à Mokolo comme inspecteur départemental. Son heure de gloire retentit un jour de l’année 1978 quand il est nommé délégué provincial de l’Education dans e Grand- Nord. Premier noir à occuper le poste, il règne sur un domaine qui couvre en réalité trois futures provinces. C’est pendant cette période qu’Ali Kirna étale au grand jour ses qualités et défauts d’homme très peu porté aux excès, c’est presque un ascète, exigeant, trop exigeant même envers lui-même et ses collaborateurs au point où il est affublé d’un surnom « la terreur ». Ce sobriquet qu’il prend comme un compliment va le suivre dans les services centraux du ministère de l’Education nationale où il va occuper plusieurs postes de directeur et d’inspecteur de 1985 à 1994.

Dans la foulée, il œuvre aux premiers pas de l’aventure télévisuelle au Cameroun comme membre du comité directeur de l’unité TV puis comme membre du conseil d’administration de la Cameroon radio télévision de 1986 à 1996. Et lorsque vient le temps de la retraire en 1994, Ah Kirna ne rentre pas dans son Logone Birni natal. Il s’installe dans sa ville d’adoption Garoua où il partage son temps entre quelques consultations à l’Unesco, à la Banque islamique de développement et ses 17 enfants que lui ont donné Hadja Afa et Hadja Karou. On croit AIl Kirna définitivement rangé dans les albums de l’histoire, mais un décret présidentiel nommant en octobre 2001 les onze membres de l’Observatoire national des élections vient ressusciter ce sexagénaire finalement inoxydable. Qui a rempilé en mai 2004 pour trois années supplémentaires à l’Onel. Par la grâce d’un décret présidentiel.

Bienvenue a l’extrême-Nord

Radioscopie d’une province et de ses personnalités incontournables

Aimé Robert BIHINA

Eric Benjamin LAMERE