BATOUFAM
Jean Ngougo
Samuel Wanko dans la broussaille
Le Ndzou’ou aura une envergure particulière, cette année à Batoufam : le roi en personne l’exécutera. Le Ndzou’ou est une danse initiatique commune à plus peuples de l’Ouest du Cameroun. Il symbolise l’achèvement, l’atteinte du piédestal social. Jean Ngougo l’appelle « le chemin de prestige des Batoufam », et chaque Batoufam aspire à l’emprunter. Le symbolisme est partout présent dans cette communauté. La société est très subir une épreuve pour accéder au niveau supérieur. Par exemple, le jeune homme subit le Ka’ak pour devenir un adulte. Il faut, en quelque sorte, traverser un poste de péage à l’instar de celui situé à l’entrée de la cité, sur l’axe Yaoundé-Bafoussam (RN 4).
Un autre symbole est la forêt sacrée. Une forêt dense, où l’on ne doit pas couper du bois au risque de ne pouvoir retrouver son chemin et où auraient vécu des lions. La figure du félin est d’ailleurs présente partout, signe de la puissance de Batoufam et de son roi, Nayang Toukam Inocent.
Au sujet de la royauté, il semble qu’une malédiction pesait jadis sur la communauté parce qu’un autre que l’héritier légitime, avait été investi. Le Prince, frustré, s’en alla avec les attributs du pouvoir. Leur restitution a levé le sort et rétabli l’harmonie des familles. De tous ces symboles, els emblèmes de Batoufam sont le signe de rassemblement, et la double cloche celui de l’unité et de dualisme (jumeaux).
Cet éclectisme de batoufam remonte à ses origines. Vers le 18ème siècle, Nakep, un chasseur ancêtre de Bo’ogouong Soup Chiwe (pilier) Ngoupo Jean, partageait le fruit de son activité aux passants qui étaient de divers horizons. Les bénéficiaires revenaient avec une telle régularité qu’ils finirent par s’installer et fonder un village dont le nom, Tse Fap, signifie littéralement « en haut des champs ». Son origine multi culturelle et le caractère grincheux de ses ressortissants, valent à Batoufam le nom des « Etats-Unis de l’Ouest ». En outre, son marché hebdomadaire à des jours alternatifs regroupe des commerçants venus de toutes les autres régions de l’Ouest Cameroun.
De même, la langue (Batoufam) est un mélange d’autres langues. Le village a son parc public, son aire de jeu multisports et son « carrefour de la joie », le carrefour kamma.
L’instruction est le fait de trois écoles publiques et deux confessionnelles, d’un collège d’enseignement secondaire (Ces) et d’une section artisanale rurale (Sar). Deux centres de santé procurent les premiers soins aux malades. Deux quincailleries existent, de même qu’une boulangerie et une auberge, sans oublier le centre culturel.
Dans le domaine politique le RDPC, le SDF et l’UNDP, quoi que n’étant pas les seuls, sont les partis politiques les plus en vue. Le christianisme a également eu raison de l’animisme. L’Eglise catholique, protestante se partagent les fidèles. L’Eglise évangélique du Cameroun (EEC) se taille la part de l’hostie, avec environ 85% d’ouailles. Mais l’œuvre missionnaire n’est pas que religieuse. L’élite locale multiplie les actions de développement. Jean Ngougo, le président de l’élite Batoufam, cite entre autres la route bitumée de la chefferie (2km), la construction de points d’eau et le soutien aux églises locales.
Les 256 Km séparant Yaoundé de son village n’empêchent pas le chargé des questions techniques à la communauté urbaine de Yaoundé, de s’y rendre pratiquement tous les week-ends. Il affirme que l’insécurité qui règne dans certaines des 16 quartiers est le fait de quelques jeunes, et que l’élite peut y mettre fin avec un peu de volonté.
A côté l’insécurité et de la qualité de l’eau, Batoufam se préoccupe du sujet Samuel Wanko. Ce héros de l’indépendance du Cameroun, ressortissant de la localité, a été assassiné dans son village. A l’endroit, un monument fut érigé mais depuis le temps, la stèle de pierre est dans la broussaille. Sa restauration n’est évoquée que timidement, certains évoquant des raisons politiques…
Au-delà de ces zones d’ombres, Jean Ngougo, tout en relativiosant les éloges qui le présentent comme l’un des plus illustres architectes camerounais, nourri le vœu de voir son village prospérer avec le commerce du chou, de la pomme de terre et surtout de la Kola, le café n’étant plus d’actualité. Il roule aussi pour la cohésion et l’intégration des ressortissants Batoufam. Il promet également de poursuivre son soutien, qui se décline en termes d’encadrement des activités de développement, et invité fièrement, du haut de sa posture de premier prince, tous ceux qui le désirent à assister à l’apothéose du 24 novembre 2007 avec la fin de l’initiation du roi Batoufam, commencée en 1989 et qui s’achève par la danse Ndzou’ou.